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Évaluation des cybermenaces nationales 2025-2026

À propos du Centre pour la cybersécurité

Le Centre canadien pour la cybersécurité (Centre pour la cybersécurité) est l’autorité technique canadienne en matière de cybersécurité. Relevant du Centre de la sécurité des télécommunications Canada (CST), le Centre pour la cybersécurité est la seule source unifiée d’avis, de conseils, de services et de soutien spécialisés en matière de cybersécurité pour les Canadiennes et Canadiens et pour les organisations canadiennes.

Le Centre pour la cybersécurité travaille étroitement avec les ministères du gouvernement du Canada, les secteurs des infrastructures essentielles, les entreprises canadiennes et les partenaires internationaux pour se préparer et réagir aux cyberévénements, pour en atténuer les conséquences et pour s’en remettre. Il est à l’écoute des entités externes et favorise les partenariats visant un cyberespace canadien fort et résilient. Conformément à la Stratégie nationale de cybersécurité, le Centre pour la cybersécurité représente une approche plus collaborative à la cybersécurité dans notre pays.

À titre de spécialistes en cybersécurité dignes de confiance, nous aidons à assurer la sécurité du Canada et des Canadiennes et Canadiens comme suit :

  • en étant une source claire et fiable de renseignements pertinents sur la cybersécurité pour les Canadiennes et Canadiens, les entreprises canadiennes ainsi que les propriétaires et les exploitants d’infrastructures essentielles;
  • en fournissant des avis et des conseils adaptés sur la cybersécurité afin de protéger les plus importants cybersystèmes canadiens;
  • en travaillant en collaboration avec les gouvernements provinciaux, territoriaux et autochtones, les administrations municipales et les partenaires du secteur privé pour résoudre les défis les plus complexes du Canada en matière de cybersécurité;
  • en développant et en diffusant nos technologies et connaissances spécialisées de cyberdéfense;
  • en défendant les cybersystèmes, notamment les réseaux du gouvernement du Canada, grâce au développement et au déploiement d’outils et de technologies de cyberdéfense sophistiqués;
  • en agissant à titre de chef de file opérationnel du gouvernement du Canada lors de cyberévénements et en tirant parti de notre expertise et de nos accès de manière à fournir de l’information opportune et utile à la gestion des incidents.

Grâce à son travail et à ses partenariats, le Centre pour la cybersécurité relève le niveau de la cybersécurité au Canada afin que les Canadiennes et Canadiens puissent vivre et travailler en ligne en toute confiance et sécurité.

 
 
 

Les cybermenaces visant le Canada sont de plus en plus complexes et sophistiquées, compromettant notre sécurité nationale et notre prospérité économique. À titre de pays ayant une présence importante dans le monde, le Canada est une cible intéressante pour les cybercriminelles et cybercriminels qui cherchent à réaliser des gains et pour les États adversaires qui cherchent à perturber les systèmes sur lesquels nous comptons.

Au cours des deux dernières années, nous avons observé une forte augmentation du nombre et de la gravité de cyberincidents, dont plusieurs ciblent nos services essentiels. Des auteures et auteurs qui mènent leurs activités à l’extérieur du pays ont également tenté d’influencer l’opinion publique et d’intimider la population, notamment la diaspora canadienne, au moyen de cybercampagnes coordonnées.

L’Évaluation des cybermenaces nationales 2025-2026 du Centre canadien pour la cybersécurité est un outil essentiel à notre compréhension des cybermenaces qui guettent le Canada. L’évaluation des menaces fait fond sur les rapports publics et le renseignement classifié pour brosser un tableau global du contexte actuel des menaces, tout en prévoyant les futures tendances. En offrant des renseignements fiables et opportuns, le rapport permet à la population et aux organisations canadiennes de se préparer aux menaces actuelles et émergentes et de les contrer.

En approfondissant notre compréhension des cybermenaces, nous renforçons également notre préparation et, à mesure que les menaces évoluent, le Centre pour la cybersécurité continuera de chercher de nouvelles façons de les combattre. Son équipe est à la pointe des efforts déployés pour accroître la cybersécurité et ainsi mieux protéger les Canadiennes et Canadiens. Notre gouvernement appuie son travail inestimable, et le Budget 2024 prévoit 917,4 millions de dollars à l’enrichissement des programmes de renseignement et de cyberopérations dans le but de contrer les menaces pour la sécurité nationale qui ne cessent d’évoluer.

Les renseignements fournis dans cette évaluation des menaces s’avèrent essentiels alors que nous travaillons à renforcer la sécurité du Canada dans un monde de plus en plus numérique.

L’honorable Bill Blair
Ministre de la Défense nationale

 
 

Il est difficile de croire que deux ans se sont déjà écoulés depuis notre dernier rapport. Au premier abord, on dirait que le contexte des cybermenaces n’a pas beaucoup changé. La cybercriminalité constitue toujours une menace, les attaques par rançongiciel continuent de cibler nos infrastructures essentielles et les activités de cybermenace parrainées par des États continuent de toucher la population canadienne.

Ce qui a changé, par contre, c’est que les États adversaires deviennent plus audacieux et plus agressifs. Les cybercriminelles et cybercriminels motivés par le profit tirent parti de nouveaux modèles opérationnels illicites pour accéder à des outils malveillants et utilisent l’intelligence artificielle pour accroître leurs capacités. Les auteures et auteurs non étatiques exploitent les grands conflits mondiaux et les controverses politiques pour mener des activités perturbatrices.

Ces nouvelles réalités et autres tendances sont présentées en détail dans la présente édition de l’Évaluation des cybermenaces nationales. Le rapport de cette année va plus loin que les éditions précédentes : il offre des exemples plus concrets d’activités de cybermenace au Canada et dans le monde, de même que nos propres statistiques sur les cyberincidents.

Bien que nos évaluations dépeignent des tendances qui devraient préoccuper quiconque lit à leur sujet, vous pouvez tenir pour certain que le Centre pour la cybersécurité continue de lutter contre ces menaces. En travaillant étroitement avec le secteur privé, l’industrie, le gouvernement et les infrastructures essentielles, nous aidons à protéger les systèmes nécessaires à notre vie quotidienne.

Que vous soyez une nouvelle lectrice ou un nouveau lecteur, une consommatrice ou un consommateur passionné, une Canadienne ou un Canadien, ou encore membre d’une petite, moyenne ou grande organisation, je suis convaincu que vous trouverez l’information contenue dans le présent rapport pertinente. J’espère qu’il vous encouragera également à réfléchir à ce que vous pouvez faire pour contribuer à notre résilience collective. Après tout, nous avons toutes et tous un rôle à jouer pour faire du Canada un pays plus sûr et plus sécuritaire.

Bien cordialement,

Rajiv Gupta
Dirigeant principal, Centre canadien pour la cybersécurité

 
 

Le Canada affronte un environnement de cybermenaces complexe et en pleine expansion comptant un éventail croissant d’auteures et auteurs de cybermenace étatiques et non étatiques malveillants et imprévisibles, comme les cybercriminelles et cybercriminels et les hacktivistes, qui ciblent ses infrastructures essentielles et compromettent sa sécurité nationale. Ces auteures et auteurs de cybermenace développent leur métier, adoptent de nouvelles technologies et collaborent dans le but d’améliorer et d’intensifier leurs activités malveillantes.

Les États adversaires du Canada sont plus agressifs dans le cyberespace. Les cyberopérations parrainées par des États visant le Canada et ses alliés ne se limitent certainement pas à l’espionnage. Les auteures et auteurs de cybermenace parrainés par des États tentent sans doute d’être perturbateurs, par exemple, en rendant un service inaccessible, en supprimant ou en divulguant des données et en manipulant des systèmes de contrôle industriels, afin de favoriser la réalisation d’objectifs militaires ou de campagnes d’information. Nous estimons que nos adversaires considèrent très probablement les infrastructures civiles essentielles comme une cible légitime de cybersabotage advenant un conflit militaire.

Parallèlement, la cybercriminalité constitue toujours pour les particuliers, les organisations et tous les ordres de gouvernement au Canada une menace généralisée et perturbatrice appuyée par un écosystème de cybercriminalité mondial prospère et résilient. Selon nous, les motivations financières qui sous-tendent la cybercriminalité inciteront sans doute l’écosystème de cybercriminalité à évoluer et à se diversifier continuellement alors que les cybercriminelles et cybercriminels tentent d’échapper aux autorités.

Principaux avis

  • Les États adversaires du Canada recourent à des cyberopérations pour causer des perturbations et créer des divisions. Les auteures et auteurs de cybermenace parrainés par des États conjuguent presque certainement des attaques de réseau informatique perturbatrices et des campagnes d’information en ligne pour intimider la population et influencer l’opinion publique. Ils ciblent fort probablement les réseaux d’infrastructures essentielles au Canada et dans les pays alliés afin de se préparer à d’éventuelles cyberopérations perturbatrices ou destructrices.
  • Le vaste et vigoureux programme de cyberactivité de la République populaire de Chine ( RPC ) représente pour le Canada à l’heure actuelle la cybermenace la plus active et la plus sophistiquée. La RPC mène des cyberopérations contre les intérêts canadiens pour servir de grands objectifs politiques et industriels, dont l’espionnage, le vol de propriété intellectuelle (PI), l’influence malveillante et la répression transnationale. Parmi nos adversaires, la portée, la capacité et la visée du programme de cyberactivité de la RPC dans le cyberespace sont inégalées.
  • Le programme de cyberactivité de la Russie renforce l’ambition de Moscou de vouloir confronter et déstabiliser le Canada et ses alliés. Le Canada est fort probablement une cible intéressante pour l’espionnage pour les auteures et auteurs de cybermenace parrainés par la Russie, notamment par la compromission de la chaîne d’approvisionnement, compte tenu de son statut de pays membre de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord, de son soutien de l’Ukraine contre l’agression russe et de sa présence dans l’Arctique. Des auteures et auteurs non étatiques pro-Russie, dont certains, selon nous, ont probablement des liens avec le gouvernement russe, ciblent le Canada dans le but d’influencer sa politique étrangère.
  • L’Iran se sert de son programme de cyberactivité pour contraindre, harceler et réprimer ses adversaires et gérer les risques d’escalade. La volonté grandissante de l’Iran à lancer des cyberattaques destructrices au-delà du Moyen-Orient et ses efforts soutenus en vue de suivre et de surveiller les adversaires du régime dans le cyberespace donnent de plus en plus de fil à retordre au Canada et à ses alliés pour assurer leur cybersécurité.
  • Le modèle opérationnel de cybercriminalité comme service (CaaS) contribue sans doute au fait que la cybercriminalité se poursuit au Canada et dans le monde. L’écosystème CaaS est soutenu par des marchés en ligne florissants où des auteures et auteurs de cybermenace spécialisés vendent des données volées et divulguées de même que des outils malveillants prêts à l’emploi à d’autres cybercriminelles et cybercriminels. Cela a presque certainement permis à un nombre croissant d’auteures et auteurs possédant diverses capacités et connaissances techniques de lancer des attaques de cybercriminalité et d’échapper aux organismes d’application de la loi.
  • Les rançongiciels constituent la principale menace émanant de la cybercriminalité à laquelle font face les infrastructures essentielles du Canada. Les rançongiciels perturbent directement la capacité des entités des infrastructures essentielles à offrir des services critiques, ce qui peut nuire au bien-être physique et émotionnel des victimes. Au cours des deux prochaines années, les auteures et auteurs de rançongiciels intensifieront presque certainement leurs tactiques d’extorsion et perfectionneront leur capacité d’accroître la pression exercée sur les victimes pour qu’elles paient des rançons et d'échapper aux organismes d’application de la loi.
 
 

L’Évaluation des cybermenaces nationales 2025-2026 (ECMN 2025-2026) fait état des cybermenaces auxquelles font face les personnes et les organisations au Canada. Elle constitue une mise à jour de l’Évaluation des cybermenaces nationales 2018 (ECMN 2018), de l’Évaluation des cybermenaces nationales 2020 (ECMN 2020) et de l’Évaluation des cybermenaces nationales 2023-2024 (ECMN 2023-2024), et fournit une analyse des années intermédiaires et des prévisions d’ici 2026. Nous recommandons de lire l’ECMN 2025-2026, l’Introduction à l’environnement de cybermenaces et les avis et conseils que nous avons publiés comme compléments d’information à la présente évaluation.

Nous avons préparé la présente évaluation pour aider les Canadiennes et Canadiens à façonner et à maintenir la cyberrésilience de notre pays. Ce n’est que lorsque le gouvernement, le secteur privé et la population travaillent ensemble que nous pouvons instaurer une résilience face aux cybermenaces au Canada.

Sources

Les avis formulés dans la présente évaluation se basent sur de multiples sources classifiées et non classifiées. Ils sont fondés sur les connaissances et l’expertise du CST en matière de cybersécurité. Le rôle que joue le CST dans la protection des systèmes d’information du gouvernement du Canada lui confère une perspective unique des tendances observées dans l’environnement de cybermenaces, ce qui lui a permis par la même occasion d’éclairer son évaluation. Le volet du mandat du CST touchant le renseignement étranger lui procure de précieuses informations sur le comportement des adversaires dans le cyberespace. Bien que le CST soit toujours tenu de protéger les sources et méthodes classifiées, il fournira aux lectrices et lecteurs, dans la mesure du possible, les justifications qui ont motivé ses avis.

Processus d’évaluation

Les évaluations des cybermenaces sont effectuées selon une méthode d’évaluation qui comprend l’évaluation de la qualité des renseignements disponibles, l’étude de différentes explications, l’atténuation des biais et l’usage d’un langage probabiliste. On emploiera des termes comme « on considère que » ou « selon nos observations » pour communiquer les évaluations analytiques. On utilisera des qualificatifs comme « possiblement », « probablement » et « très probablement » pour exprimer les probabilités.

La présente évaluation des menaces se fonde sur des renseignements disponibles en date du 20 septembre 2024.

Restrictions

La présente évaluation n’a pas pour objet de fournir une liste exhaustive des activités de cybermenace ciblant le Canada ou des conseils en matière d’atténuation. Son objectif est plutôt de décrire et d’évaluer les menaces visant le Canada. Elle cherche à comprendre la nature de l’environnement de cybermenace actuel et la façon dont les activités de cybermenace peuvent toucher la population et les organisations canadiennes. Pour obtenir des conseils sur la cybersécurité, prière de consulter le site Web du Centre pour la cybersécurité et le site Web de Pensez cybersécurité.

Lexique des estimations

Le tableau fait coïncider le lexique des estimations à une échelle de pourcentage approximative. Ces nombres ne proviennent pas d’analyses statistiques, mais sont plutôt basés sur la logique, les renseignements disponibles, des jugements antérieurs et des méthodes qui accroissent la précision des estimations.

La description détaillée suit immédiatement
Description detaillée - Lexique des estimations
  • 1 à 9 % Probabilité presque nulle
  • 10 à 24 % Probabilité très faible
  • 25 à 39 % Probabilité faible
  • 40 à 59 % Probabilité presque égale
  • 60 à 74 % Probabilité élevée
  • 75 à 89 % Probabilité très élevée
  • 90 à 99 % Probabilité presque certaine
 
 

Le Canada se retrouve dans une nouvelle ère de cybervulnérabilité, où les cybermenaces sont omniprésentes et où les Canadiennes et Canadiens ressentiront de plus en plus les répercussions des cyberincidents qui s’enchaînent et perturbent leur vie quotidienne.

Les progrès réalisés au chapitre des technologies informatiques et des communications ont ouvert la voie à un monde de connectivité omniprésente pour la population canadienne. Dans cet environnement, les plateformes en ligne et les technologies numériques continuent de façonner et d’influencer les interactions des Canadiennes et Canadiens avec le monde physique – leur façon de travailler, de faire des courses, de voyager, de se rencontrer, de s’informer et d’accéder à des services critiquesNotes de bas de page 1. Ces systèmes enregistrent et traitent de grandes quantités de données à leur sujet, souvent sur des réseaux numériques mal sécurisés ou non fiablesNotes de bas de page 2. Ces systèmes sont également interconnectés et fragiles : les cyberincidents, qu’il s’agisse de cyberattaques ou de mises à jour logicielles déficientes, peuvent faire en sorte que les compagnies aériennes, les hôpitaux, les banques et les détaillants partout dans le monde se retrouvent hors ligneNotes de bas de page 3.

Le CST et ses partenaires au Canada et au sein de la collectivité des cinq sont à l’affût des cybermenaces qui pèsent sur le Canada de la part d’auteures et auteurs de cybermenace étatiques et non étatiques et les surveillent au fur et à mesure qu’elles évoluent. L’ECMN 2025-2026 fournit au public canadien des données actuelles du CST sur les auteures et auteurs de cybermenace étatiques et non étatiques qui mènent des activités de cybermenaces malveillantes contre le Canada, et la façon d’évaluer le contexte des cybermenaces évoluera au cours des deux prochaines années. La présente évaluation est divisée en trois sections qui sont conçues pour être prises en compte indépendamment et collectivement.

  • Section 1 – Cybermenace provenant d’États adversaires : Cette section présente l’écosystème des cybermenaces parrainé par des États et porte sur les cybermenaces visant le Canada qui proviennent des pays suivants :
    • la République populaire de Chine ( RPC );
    • la Fédération de Russie (Russie);
    • la République islamique d’Iran (Iran);
    • la République populaire démocratique de Corée ( RPDC );
    • la République de l’Inde (Inde).
  • Section 2 – Menaces émanant de la cybercriminalité : Cette section porte sur l’interconnectivité de l’écosystème de la cybercriminalité comme service (CaaS) et des menaces émanant de la cybercriminalité auxquelles fait face le Canada, en particulier la fraude, les escroqueries et les rançongiciels. Elle porte également sur la menace de rançongiciel visant les infrastructures essentielles du Canada.
  • Section 3 – Tendances qui influencent le contexte des cybermenaces du Canada : Cette section présente cinq tendances qui influenceront le contexte des cybermenaces du Canada et qui guideront les activités de cybermenace touchant la population canadienne jusqu’en 2026.

Nous invitons les lectrices et lecteurs qui souhaitent en savoir davantage sur le contexte des cybermenaces en évolution et obtenir la définition de termes et de concepts importants mentionnés dans la présente ECMN à consulter les ressources suivantes :

 
 

Le Canada affronte un cyberécosystème étatique plus complexe et en pleine expansion

Adversaires stratégiques

Les programmes de cyberactivité de la RPC , de la Russie et de l’Iran demeurent les plus grandes cybermenaces stratégiques visant le Canada. Tous ces pays souhaitent contester la domination des États-Unis dans de multiples domaines, dont le cyberespace, et promouvoir une vision autoritaire de la gouvernance d’Internet et de la surveillance nationaleNotes de bas de page 4. Le programme de cyberactivité de la RPC surpasse les autres États hostiles au chapitre de la portée et des ressources consacrées aux activités de cybermenace contre le Canada.

Nouveaux programmes de cyberactivité

Parallèlement, des pays qui aspirent à devenir de nouveaux centres de pouvoir au sein du système mondial, comme l’Inde, élaborent des programmes de cyberactivité qui présentent divers niveaux de menace pour le CanadaNotes de bas de page 5. Les nouveaux États concentrent leurs activités dans le cyberespace sur les menaces nationales et les rivaux régionaux, tout en se servant de leurs cybercapacités pour suivre et surveiller les activistes et les dissidentes et dissidents vivant à l’étranger.

Cyberécosystème global

Les États avancés et émergents tirent parti d’un écosystème complexe de fournisseurs de services commerciaux de surveillance, d’entrepreneures et entrepreneurs et d’établissements de recherche affiliés pour soutenir ou exécuter des activités de cybermenace (voir la figure 1)Notes de bas de page 6. Les États font appel à ces entités pour dissimuler leurs cyberopérations ou pour acquérir des exploitations, une infrastructure numérique et des données. Les États émergents utilisent très probablement l’écosystème global pour tenter de gravir les échelons de la sophistication et d’acquérir des capacités qui pourraient dépasser leur capacité de développement interne.

Figure 1 : Écosystème des programmes de cyberactivité étatiquesNotes de bas de page 7
Figure 1 - La description détaillée suit immédiatement
Description detaillée - Figure 1 : Écosystème des programmes de cyberactivité étatiques

Graphique décrivant l’écosystème des programmes de cyberactivité étatiques. L’écosystème des programmes de cyberactivité étatiques comprend un écosystème central et un écosystème global qui sont composés de diverses entités. Chaque entité dans l’écosystème est accompagnée d’une image et d’une brève description.

Écosystème central

  • Organismes de renseignement : Auteures et auteurs de cybermenace affiliés à des organismes de renseignement civils qui mènent des opérations dans le cyberespace
  • Organismes militaires : Auteures et auteurs de cybermenace affiliés à des forces armées qui mènent des opérations dans le cyberespace
  • Sociétés de façade : Sociétés établies et contrôlées par l’État pour dissimuler les activités d’auteures ou auteurs de cybermenace étatiques et pour leur servir d’écran.

Écosystème global

  • Entités qui mènent des activités de cybermenace :
    • Entrepreneures et entrepreneurs : Entreprises privées embauchées de manière contractuelle par des organismes de renseignement, le gouvernement ou l’armée pour mener des activités de cybermenace dans le cadre de projets
    • Opératrices et opérateurs indépendants : Personnes travaillant de façon indépendante ou en petites équipes pour mener des activités de cybermenace pour l’État lorsque l’occasion se présente
  • Entités qui soutiennent des activités de cybermenace :
    • Établissements de recherche affiliés : Instituts de recherche qui développent et fournissent des technologies et des talents spécialisés à l’État
    • Fournisseurs de services commerciaux de surveillance : Entreprises privées qui développent des exploitations, des espiogiciels et d’autres services, et qui les vendent notamment à des États
    • Courtières et courtiers en exploitations : Entreprises ou personnes qui achètent des exploitations et en vendent notamment à des États
 
 

République populaire de Chine

La RPC représente pour le Canada la cybermenace la plus active et la plus sophistiquée

Le vaste et vigoureux programme de cyberactivité de la RPC comporte des capacités mondiales de cybersurveillance, d’espionnage et d’attaque, et constitue la menace de cybersécurité la plus complète à laquelle fait face le Canada à l’heure actuelle. Le Canada, tout comme ses partenaires de la collectivité des cinq, est une cible permanente du programme de cyberactivité de la RPC . La RPC mène des cyberopérations contre les intérêts canadiens pour servir de grands objectifs politiques et industriels, dont l’espionnage, le vol de propriété intellectuelle (PI), l’influence malveillante et la répression transnationale. Parmi nos adversaires, la portée, la capacité et la visée du programme de cyberactivité de la RPC dans le cyberespace sont inégalées.

Tous les ordres de gouvernement et les fonctionnaires ciblés par la RPC pour obtenir du renseignement utile

Au cours des quatre dernières années, au moins 20 réseaux associés à des ministères et organismes du gouvernement du Canada ont été compromis par des auteures et auteurs de cybermenace de la RPC .

Les auteures et auteurs de cybermenace parrainés par la RPC exécutent des opérations de cyberespionnage contre les réseaux des gouvernements fédéral, provinciaux, territoriaux et autochtones, et ceux des administrations municipales au Canada. Les auteures et auteurs de cybermenace de la RPC ont compromis et maintenu l’accès à de multiples réseaux gouvernementaux au cours des cinq dernières années, recueillant des communications et d’autres renseignements utilesNotes de bas de page 8. Bien que toutes les compromissions connues du gouvernement fédéral aient été réglées, il est fort probable que les auteures et auteurs responsables de ces intrusions aient consacré beaucoup de temps et de ressources à se renseigner sur les réseaux cibles.

Les auteures et auteurs de cybermenace parrainés par la RPC ciblent également les représentantes et représentants du gouvernement canadien, en particulier les personnes que la RPC considère comme critiques envers le Parti communiste chinois. Selon une mise en accusation du United States Department of Justice, en 2021, des auteures et auteurs de cybermenace parrainés par la RPC ont ciblé des membres de l’Alliance interparlementaire sur la Chine (IPAC), un groupe de législatrices et législateurs de partout au monde dont la fin convenue est de contrer les menaces que représente le Parti communiste chinois pour l’ordre international et les principes démocratiques. Les auteures et auteurs de menace ont envoyé des courriels contenant des images de suivi à des destinataires afin de mener des activités de reconnaissance réseau (voir la figure 2)Notes de bas de page 9. Un certain nombre de politiciennes et politiciens canadiens membres de l’IPAC ont confirmé avoir été ciblés dans cette opérationNotes de bas de page 10.

Figure 2 : Opération de la Chine menée par courriel contre des membres de l’Alliance interparlementaire sur la Chine
Figure 2 - La description détaillée suit immédiatement
Description detaillée - Figure 2 : Opération de la Chine menée par courriel contre des membres de l’Alliance interparlementaire sur la Chine

Graphique des étapes suivies dans la cadre d’une opération de la Chine menée par courriel contre des membres de l’Alliance interparlementaire sur la Chine. L’opération comprend quatre éléments :

  • Serveur de l’auteure ou auteur de menace
  • Auteure ou auteur de cybermenace
  • Courriel contenant une image de suivi
  • Destinataire de l’IPAC

Chaque élément de l’opération est représenté par une image dans un cercle. Chaque étape de l’opération est représentée par un chiffre en caractère gras, suivi d’une description de l’étape.

Les étapes de l’opération sont les suivantes :

  1. L’auteure ou auteur de cybermenace envoie un courriel contenant une image de suivi à la ou au destinataire
  2. La ou le destinataire ouvre le courriel et active l’image de suivi
  3. De l’information sur l’appareil et le réseau du destinataire, dont l’emplacement et l’adresse IP, est envoyée à un serveur contrôlé par l’auteure ou auteur de cybermenace
  4. L’auteure ou auteur de cybermenace utilise l’information pour mener des activités plus ciblées contre les routeurs domestiques et d’autres appareils du destinataire
 
 

La RPC cible les fonctionnaires et les réseaux du gouvernement canadien pour obtenir de l’information qui servira ses intérêts stratégiques, économiques et diplomatiques et qui donnera au gouvernement de la RPC l’avantage quant aux questions opérationnelles et dans les relations bilatérales entre la Chine et le Canada. Par exemple, les gouvernements provinciaux et territoriaux sont susceptibles d’être une cible intéressante étant donné qu’ils ont un pouvoir décisionnel sur le commerce régional, notamment l’extraction de ressources (par exemple, l’énergie et les minéraux critiques)Notes de bas de page 8. En plus de réaliser les priorités de la RPC en matière de collecte de renseignement, les informations recueillies servent sans doute à appuyer l’influence malveillante et les activités d’ingérence de la RPC contre les processus et les institutions démocratiques du Canada.

Les activités de cybermenace de la RPC contre le Canada semblent s’intensifier à la suite d’événements qui accroissent les tensions bilatérales entre le Canada et la RPC . Dans ce contexte, les activités de cybermenace de la RPC sont probablement conçues pour la recherche opportune du renseignement sur les réactions des fonctionnaires et pour suivre l’évolution de la situation.

Des personnes au Canada ciblées par des activités de cyberrépression transnationale de la RPC

Les auteures et auteurs de cybermenace de la RPC appuient fort probablement les mesures prises par la Chine à l’étranger pour réduire au silence les activistes, les journalistes, les collectivités de la diaspora et d’autres groupes que la RPC considère comme des menaces à la sécurité. Ces groupes, appelés collectivement « les cinq poisons » par les représentantes et représentants de la RPC , comprennent les suivants :

  • les praticiennes et praticiens du Falun Gong;
  • les Ouïghoures et Ouïghours;
  • les Tibétaines et Tibétains;
  • les partisanes et partisans de l’indépendance taïwanaise;
  • les militantes et militants prodémocratie.

Les auteures et auteurs de la RPC facilitent très probablement la répression transnationale en surveillant et en harcelant ces groupes en ligne et en les suivant au moyen de la cybersurveillanceNotes de bas de page 11. Par exemple, la RPC a été liée publiquement à des opérations de cyberespionnage contre le groupe minoritaire ouïghour, y compris des membres vivant au Canada, au moyen de courriels de harponnage et de logiciels espionsNotes de bas de page 12.

Le gouvernement de la RPC tire fort probablement parti des plateformes technologiques chinoises, dont certaines collaborent sûrement avec les services de renseignement et de sécurité de la RPC , pour faciliter la répression transnationaleNotes de bas de page 13.

La RPC cible le secteur privé et l’écosystème de l’innovation du Canada pour obtenir un avantage concurrentiel

L’écosystème de l’innovation du Canada est une priorité de longue date de la collecte de renseignement de la RPC . Le programme de cyberactivité de la RPC continue presque certainement d’appuyer les activités d’espionnage de la RPC contre le secteur privé, le milieu universitaire, les chaînes d’approvisionnement et les établissements de recherche et développement (R et D) gouvernementaux du Canada. Les auteures et auteurs de cybermenace de la RPC ont fort probablement volé des données commercialement sensibles à des entreprises et institutions canadiennes.

La RPC fait appel à des cyberentrepreneures et cyberentrepreneurs et à des opératrices et opérateurs indépendants pour appuyer l’espionnage

La RPC a recours à un marché concurrentiel d’auteures et auteurs de cybermenace contractuels et indépendants pour répondre aux besoins de la RPC en matière de collecte de renseignement. Par exemple, I-Soon est un entrepreneur privé de la RPC qui fournit des services de « pirates professionnels ». Selon des documents ayant fait l’objet d’une fuite, l’entreprise a travaillé sur des projets sur une base contractuelle pour diverses entités gouvernementales et militaires de la RPC et des sociétés d’État. I-Soon aurait vendu à sa clientèle des données exfiltrées provenant de ciblesNotes de bas de page 14.

Les auteures et auteurs de cybermenace de la RPC ciblant le Canada accordent probablement la priorité à la collecte de renseignements confidentiels et exclusifs qui servent les intérêts économiques et militaires de la RPC et qui peuvent aider à accélérer le développement de technologies avancées et stratégiques par la RPC (voir figure 3). La RPC intensifiera probablement ses activités d’espionnage contre le secteur canadien de l’innovation à mesure que les tensions économiques entre la RPC et le Canada (et ses alliés) s’accroissentNotes de bas de page 9.

Figure 3 : « Produits iconiques » d’industries de l’avenir estimés comme prioritaires pour la stratégie industrielle de la Chine (2024)Notes de bas de page 15
Figure 3 - La description détaillée suit immédiatement
Description detaillée - Figure 3 : « Produits iconiques » d’industries de l’avenir estimés comme prioritaires pour la stratégie industrielle de la Chine (2024)

Graphique illustrant dix « produits iconiques » d’industries de l’avenir estimés comme prioritaires pour la stratégie industrielle de la Chine. Chaque produit iconique est représenté par une image dans un cercle. Les dix produits iconiques sont les suivants :

  • Robots humanoïdes
  • Ordinateurs quantiques
  • Nouveaux écrans
  • Interface cerveau-machine
  • Équipement de réseau 6G
  • Nouveaux centres de calcul d’intelligence à ultra-grande échelle
  • Web 3.0
  • Équipement culturel et de tourisme haut de gamme
  • Équipement aéronautique avancé
  • Équipement de développement et d’exploitation de ressources profondes
 
 

Le prépositionnement de la RPC dans les infrastructures essentielles des États-Unis augmente le risque pour le Canada

Dans le cadre d’un changement stratégique, la RPC intègre très probablement les cyberopérations offensives à sa planification militaire afin de tirer un avantage lors d’un conflit potentiel avec les États-Unis. Les auteures et auteurs de cybermenace parrainés par la RPC , connus sous le nom de Volt Typhoon,  cherchent presque certainement à se prépositionner au sein des réseaux d’infrastructures essentielles des États-Unis en vue de lancer des cyberattaques perturbatrices ou destructrices advenant une crise ou un conflit majeur avec les États-Unis. Selon les représentantes et représentants américains, l’opération de la RPC vise à ralentir l’intervention des forces armées américaines et à semer la panique dans la sociétéNotes de bas de page 16. Le groupe Volt Typhoon est particulièrement digne de mention, car la RPC n’a jamais mené de cyberopérations perturbatrices ou destructrices contre des infrastructures essentiellesNotes de bas de page 17.

Nous estimons que la menace directe que les auteures et auteurs de cybermenace parrainés par la RPC représentent pour les infrastructures essentielles canadiennes est probablement inférieure à celle qui pèse sur les infrastructures américaines. Bien que les futures opérations de cyberguerre de la RPC visent probablement les États-Unis, les activités de cybermenace perturbatrices ou destructrices contre les infrastructures essentielles intégrées de l’Amérique du Nord, comme les pipelines, les réseaux électriques et les voies ferrées, auraient probablement une incidence sur le Canada en raison de l’interopérabilité et l’interdépendance frontalièresNotes de bas de page 8.

Fédération de Russie

La Russie tire parti de son programme de cyberactivité pour affronter l’Occident

Le programme de cyberactivité imprévisible de la Russie remet régulièrement en question les normes en vigueur dans le cyberespace et renforce l’ambition de Moscou de vouloir confronter et déstabiliser le Canada et ses alliés.

La Russie considère presque certainement son programme de cyberactivité comme faisant partie intégrante d’une stratégie à plusieurs niveaux visant à influencer et à façonner l’environnement de l’information. La Russie conjugue les activités de cyberespionnage conventionnelles et les attaques de réseaux informatiques aux activités de désinformation et d’influence pourNotes de bas de page 18 :

  • promouvoir le statut mondial de la Russie et renforcer les discours pro-Russie;
  • miner la confiance dans les institutions démocratiques;
  • inciter la population à appuyer les efforts de guerre de la Russie, tant au pays qu’à l’étranger;
  • affaiblir ou gêner psychologiquement ses adversaires.

Les activités de cybermenace de la Russie sont soutenues par un réseau d’auteures et auteurs étatiques et non étatiques, notamment un groupe en constante évolution de cybercriminelles et cybercriminels, de hacktivistes et de « pirates professionnels » associés à la Russie, lesquels sont probablement motivés par un mélange de patriotisme, de profit ou d’opportunisme. Cette stratégie hybride, qui procure à la Russie la possibilité de nier, semble avoir inspiré d’autres États, créant ainsi un environnement de cybermenaces plus complexe pour le Canada et ses alliésNotes de bas de page 19.

Une auteure ou un auteur de cybermenace russe lance une cyberattaque destructive contre l’Ukraine pour causer des effets psychologiques

En décembre 2023, une auteure ou un auteur de cybermenace russe a lancé une cyberattaque par virus effaceur destructive contre la société de télécommunications ukrainienne Kyivstar, privant des millions d’Ukrainiennes et Ukrainiens d’Internet et de services mobiles pendant plusieurs jours. La personne en cause se serait introduite dans les systèmes de Kyivstar au plus tôt en mai 2023 et aurait été en mesure de voler des renseignements sur les abonnées et abonnés et d’intercepter des messages texte. Cette personne a revendiqué l’attaque dans un message sur la plateforme Telegram adressé au président ukrainien Volodymyr Zelenskyy. Selon les responsables ukrainiens, l’objectif de l’attaque destructrice était de porter un coup psychologique à l’UkraineNotes de bas de page 20.

Le Canada ciblé par la Russie à des fins d’espionnage

Le Canada est fort probablement une cible intéressante pour l’espionnage pour les auteures et auteurs de cybermenace parrainés par la Russie, compte tenu de son statut de pays membre de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord, de son soutien de l’Ukraine et de sa présence dans l’Arctique. Des auteures et auteurs de cybermenace russes ciblent fort probablement les réseaux du gouvernement, des forces armées, du secteur privé et des infrastructures essentielles du pays dans le cadre d’activités de collecte de renseignement militaire et étrangerNotes de bas de page 21.

Les organisations des secteurs public et privé au Canada sont également vulnérables aux compromissions de la chaîne d’approvisionnement mondiale par les auteures et auteurs de cybermenace russes. Par exemple, en 2020, des auteures et auteurs de cybermenace parrainés par la Russie ont compromis la chaîne d’approvisionnement en implantant des maliciels dans une mise à jour du logiciel SolarWindsNotes de bas de page 22. Les auteures et auteurs de cybermenace parrainés par la Russie ciblent presque certainement les services infonuagiques comptant un grand nombre de clientes et clients au CanadaNotes de bas de page 23.

 
 

Une auteure ou un auteur de cybermenace russe compromet le système de courriel d’entreprise de Microsoft à des fins d’espionnage

En janvier 2024, Microsoft a découvert qu’une auteure ou un auteur de cybermenace parrainé par la Russie connu sous le nom de Midnight Blizzard s'était introduit dans son service de courriel d’entreprise en nuage. Midnight Blizzard a accédé aux comptes de courriel d’entreprise de Microsoft, exfiltrant des correspondances entre Microsoft et des représentantes et représentants du gouvernement au Canada, aux États-Unis et au Royaume-UniNotes de bas de page 24. Selon Microsoft, la personne en cause cherchait initialement à obtenir des renseignements à son sujetNotes de bas de page 25. Cette personne a ensuite utilisé des données personnelles et des justificatifs d’identité dans les courriels pour tenter d’accéder aux systèmes clients de Microsoft.

Le Canada ciblé par des auteures et auteurs de cybermenace non étatiques pro-Russie pour influencer sa politique étrangère

À la suite de l’invasion de l’Ukraine par la Russie en 2022, des auteures et auteurs de cybermenace non étatiques pro-Russie, dont certains, nous estimons, ont probablement des liens avec le gouvernement et les services de renseignement russes, ont presque certainement mené des activités perturbatrices de cybermenace contre le Canada et ont utilisé les médias sociaux pour attirer l’attention sur ces attaques (voir la figure 4)Notes de bas de page 26. Nous croyons que ces campagnes visent fort probablement à influencer et à miner le soutien du Canada à l’endroit de l’Ukraine. Par exemple, une campagne d’attaque par déni de service distribué (DDoS) menée en avril 2023 par des auteures et auteurs de cybermenace non étatiques pro-Russie contre les sites Web du gouvernement du Canada et du secteur privé canadien a coïncidé avec la visite du premier ministre ukrainien au CanadaNotes de bas de page 27.

Figure 4 : Exemples notables d’activités de cybermenace non étatiques pro-Russie contre le Canada (2023)Notes de bas de page 28

Février 2023

Des groupes d’auteures et auteurs de cybermenace non étatiques pro-Russie participent à une campagne visant à saboter les infrastructures essentielles de pays qui prêtent assistance à l’Ukraine, y compris le Canada.


Avril 2023

Un groupe d’auteures et auteurs de cybermenace non étatique pro-Russie revendique une campagne par DDoS contre des sites Web canadiens, notamment le site Web public du Cabinet du Premier ministre.


Septembre 2023

Un groupe d’auteures et auteurs de cybermenace non étatique pro-Russie revendique une campagne par DDoS contre des sites Web canadiens, notamment des sites Web du gouvernement provincial du Québec.

 
 

Bien que les activités de cybermenace menées par des auteures et auteurs non étatiques pro-Russie contre le Canada aient principalement consisté en des attaques par DDoS et la défiguration de sites Web, quelques auteures et auteurs ont tenté de compromettre les systèmes de technologies opérationnelles (TO) au sein des infrastructures essentielles en Amérique du Nord et en Europe dans le but de perturber ces systèmes. Cette activité cible de façon opportuniste les appareils accessibles par Internet et exploite les vulnérabilités de base, comme les logiciels d’accès à distance non sécurisés ou l’utilisation de mots de passe par défautNotes de bas de page 29. Par exemple, en janvier 2024, un groupe d’auteures et auteurs de cybermenace non étatiques pro-Russie a revendiqué le débordement des réservoirs de stockage d’eau dans des installations de traitement de l’eau au Texas. Le groupe aurait publié une vidéo sur la compromission et la manipulation des systèmes de contrôle à chaque installation sur un forum publicNotes de bas de page 30.

Nous estimons que des parties prenantes non étatiques pro-Russie tenteront probablement de perturber les systèmes de TO vulnérables branchés à Internet au sein des infrastructures essentielles canadiennes lorsque l’occasion se présentera. Les activités de cybermenace contre la TO menées par des auteures et auteurs de cybermenace non étatiques pro-Russie pourraient entraîner une défaillance des systèmes, ce qui pourrait endommager ou détruire ces systèmes et nuire à la sécurité publique.

République islamique d’Iran

L’Iran intensifie ses activités de cybermenace perturbatrices contre l’Occident

L’Iran dispose d’un programme de cyberactivité agressif, et le régime s’en sert pour contraindre, harceler et réprimer ses opposants et gérer les risques d’escalade. La volonté grandissante de l’Iran de lancer des cyberattaques destructrices au-delà du Moyen-Orient et ses efforts soutenus en vue de suivre et de surveiller les opposants du régime dans le cyberespace représentent une difficulté grandissante pour le Canada et ses alliés en matière de cybersécurité.

L’Iran a profité de son duel disputé dans le cyberespace avec Israël pour renforcer ses capacités de cyberespionnage et de cyberopérations offensives et pour perfectionner ses campagnes de collecte d’information, et il met presque assurément ses nouvelles connaissances à profit contre des cibles en OccidentNotes de bas de page 31. Pour l’heure, le Canada n’est probablement pas une cible prioritaire du programme de cyberactivité de l’Iran, mais les auteures et auteurs de cybermenace de ce pays ont vraisemblablement accès à des réseaux informatiques au Canada, dont ceux d’infrastructures essentielles.

Les cyberopérations adverses menées par l’Iran dans le monde représentent un risque pour le Canada

Les auteures et auteurs de cybermenace parrainés par l’Iran ont mis sur pied et lancé des cyberopérations perturbatrices en plusieurs étapes partout dans le monde pour intimider les opposants du régime, signaler le mécontentement de celui-ci et persuader un pays de changer son attitude (voir la figure 5)Notes de bas de page 32.

Les auteures et auteurs de cybermenace iraniens ont mené des attaques par déni de service, tenté de manipuler des systèmes de contrôle industriels et accédé à des réseaux gouvernementaux et privés pour chiffrer, effacer et couler des données. L’Iran a tissé un réseau de hacktivisme composé de personas et de canaux de médias sociaux qui exploitent les événements perturbateurs pour propager les messages du régime et influencer le public cible tout en faisant en sorte que la participation de Téhéran à ces activités reste vague et niableNotes de bas de page 33.

Selon nos observations, la montée des tensions dans les relations bilatérales canado-iraniennes augmenterait fort probablement le risque que le Canada devienne une cible des cyberopérations perturbatrices de l’Iran.

Figure 5 : Cyberopérations perturbatrices liées publiquement à l’Iran (2021-2023)Notes de bas de page 34
Figure 5 - La description détaillée suit immédiatement
Description detaillée - Figure 5 : Cyberopérations perturbatrices liées publiquement à l’Iran (2021-2023)

Graphique linéaire montrant le nombre mensuel de cyberopérations perturbatrices liées publiquement à l’Iran, de janvier 2021 à décembre 2023. L’axe horizontal représente les mois, de janvier 2021 à décembre 2023. L’axe vertical représente le nombre d’opérations, de 0 à 9.

le nombre mensuel de cyberopérations perturbatrices liées publiquement à l’Iran, de janvier 2021 à décembre 2023
Année Janv. Févr. Mars Avr. Mai Juin Juill. Août Sept. Oct. Nov. Déc.
2021 1 0 0 0 0 0 0 0 0 1 0 0
2022 1 2 1 0 0 2 2 0 2 0 1 0
2023 2 1 0 0 0 0 1 2 4 8 2 4

Deux exemples de cyberopérations perturbatrices iraniennes sont mis en évidence dans le graphique à l’aide d’un point rouge et décrits dans un encadré.

  • Le premier exemple décrit une opération menée par HomeLand Justice à compter de juillet 2022 : Depuis juillet 2022, des auteures et auteurs de cybermenace parrainés par l’Iran qui se font appeler HomeLand Justice ont lancé des cyberattaques destructives contre des réseaux du gouvernement et d’entreprises de l’Albanie, un pays allié membre de l’OTAN, apparemment pour se venger du fait que le pays accueille le groupe d’opposition iranien Moudjahidine-e-Khalq.
  • Le deuxième exemple décrit une opération menée par Cyber Av3ngers à compter d’octobre 2023 : Des auteures et auteurs de cybermenace parrainés par l’Iran, qui ont adopté le nom de Cyber Av3ngers, ont défiguré des dispositifs fabriqués en Israël et utilisés dans des systèmes d’alimentation en eau partout dans le monde, probablement dans le but de miner la façon dont Israël est perçu dans le monde et de diminuer le soutien qu’il reçoit.
 
 

L’Iran recourt au piratage psychologique à des fins de répression transnationale et d’espionnage

Il est probable que des auteures et auteurs de cybermenace parrainés par l’Iran surveillent des personnes au Canada qui sont une menace aux yeux du régime iranien, comme des activistes politiques, des journalistes, des chercheuses ou chercheurs dans le domaine des droits de la personne et des membres de la diaspora iranienne. Les groupes de cybermenace iraniens sont particulièrement habiles pour combiner le piratage psychologique et le harponnage dans le but de soutenir les activités de répression transnationale et de surveillance de Téhéran (voir la figure 6)Notes de bas de page 35. À titre d’exemple, l’Iran s’est fort probablement servi de l’écrasement du vol 752 à Téhéran comme leurre dans ses opérations de piratage psychologique et de harponnage. Ces efforts sont particulièrement inquiétants à la lumière de récentes informations rendues publiques qui lient l’Iran à des complots d’enlèvement et d’assassinat contre des opposants du régime qui habitent en OccidentNotes de bas de page 36.

Figure 6 : Éléments d’une campagne de piratage psychologique menée par l’Iran

Utilisation de personas : Les auteures et auteurs de cybermenace iraniens manipulent leurs cibles en recourant à de faux personnages (par exemple, des personnes séduisantes) ou en se faisant passer pour de vraies personnes (par exemple, des journalistes).

Instauration de la confiance : Les auteures et auteurs de cybermenace iraniens utilisent les personas pour établir un lien de confiance avec les cibles en exploitant leurs vulnérabilités émotionnelles ou en leur offrant de fausses occasions professionnelles ou médiatiques.

Activité malveillante : Les auteures et auteurs de cybermenace iraniens envoient à la cible une application, un lien ou un document malveillant pour recueillir ses justificatifs d’identité ou déployer un maliciel.

L’Iran se sert aussi du piratage psychologique pour cibler des fonctionnaires et accéder à des réseaux gouvernementaux et privés de partout dans le monde, notamment dans les secteurs de l’aérospatiale, de l’énergie, de la défense, des voyages et des télécommunications, pour répondre à ses besoins en matière de collecte de renseignementNotes de bas de page 37.

République populaire démocratique de Corée

Le programme de cyberactivité de la République populaire démocratique de Corée ( RPDC ) comporte deux volets : prioriser la production de revenus et répondre aux besoins du régime en matière de stratégie et de renseignement. Les auteures et auteurs de cybermenace parrainés par la RPDC se livrent régulièrement à des activités de cybercriminalité, dont l’exploitation de rançongiciel et le vol de cryptomonnaies, pour financer les ambitions politiques et militaires du régime ainsi que les opérations du programme de cyberactivitéNotes de bas de page 38. Le régime nord coréen oriente et protège fort probablement ces attaques motivées par des gains financiers et tolère vraisemblablement les activités de cybercriminalité nuisibles et perturbatricesNotes de bas de page 39.

Nous estimons que le programme de cyberactivité de la RPDC ne représente pas pour le Canada une cybermenace sur le plan stratégique comparable à celles que font planer d’autres pays, comme la RPC et la Russie. Toutefois, la volonté de Pyongyang de se tourner vers la cybercriminalité pour gouverner le pays fait presque assurément peser une menace persistante et sophistiquée sur des personnes et des organismes du Canada issus d’une grande variété d’industries et de secteurs de l’économie. La RPDC continuera presque assurément de s’adapter à l’évolution de la technologie numérique et de se livrer à de nouvelles opérations de cybercriminalitéNotes de bas de page 40.

République de l’Inde

Il est presque certain que les têtes dirigeantes de l’Inde aspirent à un programme de cyberactivité moderne doté de capacités internesNotes de bas de page 41. L’Inde se sert fort probablement de son programme de cyberactivité pour faire avancer ses objectifs liés à la sécurité nationale, notamment en matière d’espionnage et d’antiterrorisme, et pour soutenir ses efforts visant à rehausser son statut mondial et à contrer les messages défavorables à l’endroit du pays et de son gouvernement. Nous estimons que le programme de cyberactivité indien recourt probablement à des fournisseurs commerciaux de cyberactivité pour renforcer ses opérationsNotes de bas de page 42.

Selon nos observations, des auteures et auteurs de cybermenace parrainés par l’Inde s’adonnent probablement à des activités de cybermenace contre les réseaux du gouvernement du Canada à des fins d’espionnage. Nous sommes d’avis que les relations bilatérales officielles canado-indiennes dicteront fort probablement les activités de cybermenace parrainées par l’Inde au détriment du Canada.

 
 

Un écosystème de cybercriminalité virtuel et interconnecté facilite la cybercriminalité comme service

La cybercriminalité opportuniste et motivée par des gains financiers est toujours l’activité de cybermenace la plus susceptible de toucher la population et les entreprises canadiennes. Nous estimons que si la cybercriminalité perdure au Canada et dans le monde, c’est presque assurément, en partie, à cause de la popularité du modèle opérationnel de cybercriminalité comme service (CaaS). Des auteures et auteurs de menace spécialisés recourent à la CaaS pour vendre en ligne à d’autres cybercriminelles et cybercriminels des données volées ou fuitées et des outils malveillants prêts à l’emploiNotes de bas de page 46.

Services de la CaaS que les cybercriminelles et cybercriminels peuvent se procurer en ligne

  • Maliciel comme service : Un service de soutien au développement et au déploiement de maliciels servant à voler ou à chiffrer les données de victimes ou à acquérir le contrôle à distance des systèmes des victimes.
  • Rançongiciel comme service : Un noyau de développeuses et développeurs vend ou loue sa variante de rançongiciel à d’autres auteures et auteurs de menace, appelés associées et associés; les développeurs aident les associées et associés dans le déploiement de leur rançongiciel en échange d’un paiement forfaitaire unique, de frais d’abonnement, d’une part des profits ou des trois.
  • Accès comme service : Des auteures et auteurs de menace spécialisés accèdent aux systèmes de victimes et vendent cet accès à des clientes et clients.
  • Hameçonnage comme service : Instructions détaillées, modèles de courriels et outils prêts à l’emploi servant à exécuter des attaques d’hameçonnage.
  • Attaque par déni de service distribué (DDoS) comme service : Location de réseaux de zombies et d’interfaces conviviales permettant aux clientes et clients de lancer des attaques par DDoS .
  • Exploitation comme service : Des auteures et auteurs de menace spécialisés louent des trousses d’exploit à des clientes et clients et aident ceux-ci à utiliser les exploitations pour profiter de vulnérabilités logicielles.
Figure 7 : Utilisation des plateformes en ligne par les cybercriminelles et cybercriminels

Marchés : Plateformes criminelles en ligne qui ont un fonctionnement semblable aux marchés en ligne légitimes comme Etsy ou eBay. Les cybercriminelles et cybercriminels utilisent des marchés pour vendre ou acheter des outils et services de cybercriminalitéNotes de bas de page 43.

Forums : Les cybercriminelles et cybercriminels recourent à des forums pour communiquer entre eux et se procurer des outils et services illicitesNotes de bas de page 44.

Plateformes de clavardage : Les cybercriminelles et cybercriminels se connectent à des plateformes de messagerie chiffrées comme Telegram pour communiquer dans des canaux privés portant sur divers sujets liés à la cybercriminalitéNotes de bas de page 45.

 

Nous estimons que la CaaS a presque certainement fait augmenter le nombre de personnes se livrant à la cybercriminalité étant donné qu’elle réduit les obstacles à l’entrée et permet à des auteures et auteurs de menace moins habiles sur le plan technique de lancer des attaques de cybercriminalité. Même les grands groupes de la cybercriminalité profitent des offres de la CaaS , comme les maliciels, les infrastructures de cyberattaque (par exemple, infrastructure d’hébergement) et les services de blanchiment d’argent, pour augmenter leurs capacités à mener des activités de la cybercriminalitéNotes de bas de page 47.

Les plateformes en ligne jouent un rôle important dans la facilitation de la cybercriminalité

L’écosystème de la cybercriminalité est grandement interconnecté. Les plateformes en ligne, comme les marchés, les forums et les plateformes de clavardage liés à la cybercriminalité, facilitent la vente et la revente de données volées ainsi que les interactions entre les fournisseurs de CaaS et les cybercriminelles et cybercriminels qui cherchent à se procurer ces services. De plus, ces plateformes en ligne permettent à des cybercriminelles et cybercriminels de toutes les sphères d’activité d’établir des liens professionnels entre eux et d’échanger des ressourcesNotes de bas de page 48.

 

Genesis Market

Genesis Market était un marché de la cybercriminalité qui servait à la vente de justificatifs d’identité volés de millions d’ordinateurs compromis dans le monde. Les cybercriminelles et cybercriminels achetaient sur Genesis des justificatifs d’accès et des empreintes digitales numériques qui leur permettaient d’accéder à des comptes en ligne sans déclencher les alertes de sécurité. Genesis Market est lié à des millions d’incidents de cybersécurité motivés par des gains financiers, notamment des cas de fraude et des attaques par rançongicielNotes de bas de page 49 perpétrés dès la création du marché en mars 2018 jusqu’à son démantèlement par les forces policières en avril 2023Notes de bas de page 50.

La fraude et les escroqueries sont toujours une menace pour les Canadiennes et Canadiens

Figure 8 : Pertes attribuables à des fraudes au Canada

(en dollars canadiens)Notes de bas de page 51

2021 : 383 millions

2022 : 530 millions

2023 : 567 millions

Comme nous l’avions mentionné dans l’ECMN de 2023-2024, nous sommes d’avis que la fraude et les escroqueries sont presque certainement les formes les plus communes de cybercrimes qui touchent les Canadiennes et Canadiens. Les cybercriminelles et cybercriminels tentent de voler de l’information personnelle, financière et d’entreprise en se servant de techniques de piratage psychologique comme l’hameçonnageNotes de bas de page 52. L’hameçonnage est parmi les types de fraude les plus signalés au Canada et le harponnage est au nombre de ceux qui ont les plus importantes répercussions financières signalées pour les victimesNotes de bas de page 53. Par exemple, le harponnage peut mener à des compromissions qui entraînent le vol de données sensibles et qui peuvent engendrer des pertes financières considérables pour les entreprisesNotes de bas de page 54.

De nouveaux outils et services rendent l’hameçonnage plus accessible et perfectionné

Nous estimons que la menace de fraude et d’escroquerie continuera de s’intensifier au cours des deux prochaines années en raison de la prolifération des outils à la disposition des cybercriminelles et cybercriminels, comme les trousses d’hameçonnage comme service vendues en ligne ainsi que les agents conversationnels alimentés par l’intelligence artificielle qui conçoivent des courriels d’hameçonnage convaincants. En raison de ces outils, les attaques par hameçonnage sont davantage à la portée des cybercriminelles et cybercriminels moins doués sur le plan techniqueNotes de bas de page 55.

 
 

La menace de rançongiciel au Canada continue de croître et d’évoluer

Les rançongiciels sont parmi les formes de cybercrime les plus perturbatrices qui planent sur le Canada et ses alliés. Depuis 2020, la portée, la fréquence et la complexité des attaques par rançongiciel ne font qu’augmenterNotes de bas de page 56. Nous estimons que les rançongiciels continueront presque assurément à représenter la cybermenace la plus percutante qui pèsera sur les organisations canadiennes ces deux prochaines années étant donné que les opératrices et opérateurs de rançongiciel peaufinent constamment leurs tactiques pour maximiser les profitsNotes de bas de page 57.

Augmentation du nombre d’incidents liés à des rançongiciels et de rançons

2023 a été une année record en ce qui a trait aux rançongiciels. Certaines estimations indiquent que le nombre d’incidents liés à des rançongiciels dans le monde a augmenté de 74 pour cent en 2023 par rapport à 2022Notes de bas de page 58, et que les rançons versées à l’échelle planétaire se sont élevées à la somme record d’un milliard de dollars américainsNotes de bas de page 59. Selon une estimation, la rançon moyenne versée au Canada en 2023 était de 1,130 million de dollars canadiens, ce qui représente une hausse de presque 150 pour cent sur deux ansNotes de bas de page 60. Des sources ouvertes rapportent que cette tendance s’est poursuivie au cours de la première moitié de 2024 et que le montant des rançons et le nombre d’incidents devraient dépasser ceux observés en 2023Notes de bas de page 61. Les augmentations observées d’incidents liés à des rançongiciels sont presque assurément plus élevées étant donné que de nombreux incidents ne sont pas signalésNotes de bas de page 62. Nous estimons que la menace de rançongiciel continuera presque certainement de croître au cours des deux prochaines années à moins que l’écosystème de rançongiciel soit profondément fragilisé.

Principales menaces de rançongiciel dans le monde en 2023

  1. LOCKBIT : Lockbit est un groupe cybercriminel de RaaS qui exploite une variante de rançongiciel du même nom qui a servi à nuire à une grande variété d’entités des infrastructures essentielles, notamment dans les secteurs gouvernemental, des soins de santé et de l’énergieNotes de bas de page 63.
  2. ALPHV : ALPHV est un groupe cybercriminel de RaaS qui exploite la variante de rançongiciel BlackCat qui a servi à nuire à diverses industries des secteurs financier, manufacturier, juridique et judiciaire et de services professionnels, entre autresNotes de bas de page 64.
  3. CL0P : CL0P est un RaaS exploité par le groupe cybercriminel russophone TA505 qui a servi à nuire à diverses industries en exploitant des vulnérabilités logicielles non corrigéesNotes de bas de page 65.
  4. PLAY : Play est un groupe cybercriminel de RaaS qui exploite une variante de rançongiciel du même nom qui a servi à nuire à des organismes des secteurs des soins de santé et de la manufactureNotes de bas de page 66.
  5. BLACK BASTA : Black Basta est un groupe cybercriminel de RaaS qui exploite une variante de rançongiciel du même nom qui a servi à nuire à des entités des infrastructures essentielles, dont des organismes des secteurs gouvernemental et des soins de santéNotes de bas de page 67.
Figure 9 : Croissance relative depuis 2021 du nombre d’incidents liés à des rançongiciels au Canada connus du Centre pour la cybersécuritéNotes de bas de page 68
Figure 9 - La description détaillée suit immédiatement
Description detaillée - Figure 9 : Croissance relative depuis 2021 du nombre d’incidents liés à des rançongiciels au Canada connus du Centre pour la cybersécurité

Graphique à barres illustrant la croissance relative depuis 2021 du nombre d’incidents liés à des rançongiciels au Canada connus du Centre pour la cybersécurité par des victimes canadiennes entre 2021 et 2024. Les chiffres de 2024 représentent des estimations fondées sur les données des six premiers mois de 2024. D’après nos données, les incidents liés à des rançongiciels ont augmenté, en moyenne, de 26 % d’année en année depuis 2021. Cette figure montre une baisse temporaire des incidents liés à des rançongiciels en 2022.

 
 

En 2022, nous avons estimé que la diminution observée s’explique en partie par la pression accrue exercée par les forces policières qui a probablement poussé certains opérateurs et opératrices de rançongiciel à suspendre temporairement leurs activités. L’invasion de l’Ukraine par la Russie a probablement aussi perturbé l’écosystème des rançongiciels. Par exemple, certains opérateurs et opératrices de rançongiciel ont vraisemblablement délaissé la cybercriminalité motivée par des intérêts financiers pour lancer des attaques à caractère politiqueNotes de bas de page 69. Toutefois, en 2023, les opératrices et opérateurs de rançongiciel se sont fort probablement remis sur pied après ces perturbations et ont élevé leur jeu d’un cran pour compenser les pertes financières subies en 2022Notes de bas de page 70.

Répercussions de CL0P – Compromissions des chaînes d’approvisionnement numériques

Pour se procurer divers services et applications, de nombreuses organisations comptent sur les chaînes d’approvisionnement numériques composées de multiples fournisseurs. Les cybercriminelles et cybercriminels peuvent profiter d’une intrusion contre un seul fournisseur pour déclencher une cascade d’incidents touchant de nombreuses organisationsNotes de bas de page 71. Par exemple, la flambée d’incidents liés à des rançongiciels à l’échelle planétaire en 2023 peut fort probablement être en partie attribuée à CL0P, une souche de rançongiciel exploitée par des cybercriminelles et cybercriminels russophonesNotes de bas de page 72. CL0P a servi à exploiter des vulnérabilités non corrigées dans les populaires logiciels d’application de transfert de fichiers GoAnywhere et MOVEit. Selon les estimations, seulement avec MOVEit, CL0P a touché 2 750 entreprises et 94 millions de personnesNotes de bas de page 73 et engrangé environ 100 millions de dollars américains en rançonsNotes de bas de page 74. Parce qu’elles sont très profitables, les attaques par rançongiciel contre les chaînes d’approvisionnement numériques vont presque certainement se poursuivre au cours des deux prochaines années.

Les principaux groupes de rançongiciel utilisent le modèle de rançongiciel comme service

Comme l’indiquait l’ECMN de 2023-2024, la plupart des principaux groupes de rançongiciel qui sévissent au Canada recourent au modèle de RaaS selon lequel un noyau d’opératrices et opérateurs vend ou loue sa variante de rançongiciel à des associées ou associés qui lancent les attaques. L’écosystème de RaaS fait partie de l’écosystème plus vaste de CaaS . Il est alimenté par une chaîne d’approvisionnement complexe composée de divers intervenants qui offrent différents services de CaaS pouvant servir à mener des attaques par rançongiciel. Cela comprend les services de soutien qui sont à la base du fonctionnement de l’écosystème (voir la figure 10)Notes de bas de page 75.

Nous estimons que la popularité soutenue du RaaS contribue presque certainement à l’augmentation du nombre d’incidents liés à des rançongiciels étant donné qu’il réduit les obstacles techniques à l’entrée et permet à un plus grand nombre d’auteures et auteurs de lancer des attaques sans avoir à développer leur propre rançongicielNotes de bas de page 76. Il est difficile de localiser précisément les opératrices et opérateurs de rançongiciel. Toutefois, nous estimons que le noyau de membres des principaux groupes de rançongiciel qui sévissent au Canada se trouve fort probablement dans des pays de l’ancienne Union soviétique, mais que leurs associées ou associés mènent leurs activités à partir de n’importe où dans le monde.

Figure 10 : Écosystème du rançongiciel comme service (Raas)
Figure 10 - La description détaillée suit immédiatement
Description detaillée - Figure 10 : Écosystème du rançongiciel comme service (RaaS)

Graphique représentant les différentes parties de l’écosystème du rançongiciel comme service et leur interaction pour permettre aux cybercriminelles et cybercriminels de mener des attaques par rançongiciel.

Les marchés et forums de cybercriminalité proposent des offres de cybercriminalité comme service et facilitent ainsi la création et le déploiement de rançongiciels. Des groupes RaaS centraux développent des rançongiciels et les louent à des affiliés sur des marchés et forums. Les affiliés utilisent ensuite les rançongiciels pour attaquer des cibles. Les données volées des victimes de rançongiciel se retrouvent à leur tour sur les marchés et forums de cybercriminalité, où elles serviront à mener d’autres activités de cybercriminalité.

À la droite du graphique se trouvent les trois services de soutien suivants qui sont à la base de l’ensemble de l’écosystème de la cybercriminalité :

  • Infrastructure d’hébergement : Les auteures et auteurs de menace louent une infrastructure d’hébergement Internet capable d’offrir une protection raisonnable contre les forces de l’ordre.
  • Services financiers : Les auteures et auteurs de menace utilisent des cryptomonnaies pseudo-anonymes pour faire l’achat d’outils de rançongiciel et de divers services illicites de blanchiment de fonds recueillis dans le cadre d’opérations.
  • Communications : Les auteures et auteurs de menace emploient différentes plateformes pour communiquer de façon anonyme entre eux et avec leurs victimes pour négocier des demandes de rançon.
 
 

Les rançongiciels affectent les infrastructures essentielles du Canada

Nous estimons que les opératrices et opérateurs de rançongiciel profitent presque certainement des occasions qui se présentent à eux et ne visent aucune industrie en particulier. Ces dernières années, une grande variété d’entreprises canadiennes ont été touchées par des incidents liés à des rançongiciels, y compris de grands détaillants et des établissements d’enseignement. Ces incidents démontrent qu’aucune entité n’est à l’abri de la menace de rançongiciel. Toutefois, les rançongiciels sont presque assurément la principale menace de la cybercriminalité qui plane sur les infrastructures essentielles du Canada, car ils peuvent paralyser des opérations d’affaires essentielles, détruire ou endommager des données commerciales importantes et révéler de l’information sensibleNotes de bas de page 77. En plus d’engendrer des pertes financières causées par la réparation des systèmes et la perturbation des opérations, les attaques par rançongiciel peuvent ébranler des services essentiels et ainsi mettre en péril la sécurité physique et le bien-être émotionnel des victimesNotes de bas de page 78.

Les infrastructures essentielles sont une cible attrayante pour les opératrices et opérateurs de rançongiciel, car elles sont perçues comme étant disposées à payer de fortes rançons pour protéger leurs opérations essentielles. En 2021, des rançons de plusieurs millions de dollars ont été versées aux auteures et auteurs de menace responsables des incidents liés à des rançongiciels menés contre Colonial Pipeline aux États-Unis et les opérations de JBS Foods en Amérique du Nord et en AustralieNotes de bas de page 79.

Selon des rapports sur la cybersécurité, les victimes en 2023 étaient moins enclines à payer les rançons demandéesNotes de bas de page 74. Nous estimons que la perspective d’engranger d’importants profits, jumelée à la volonté décroissante des victimes de verser des rançons, ont presque certainement encouragés les groupes de rançongiciel plus avancés sur le plan technique à rehausser leurs techniques d’extorsion et à embaucher des associées ou associés compétents capables de cibler des entités des infrastructures essentielles pour empocher des rançons plus importantesNotes de bas de page 80. Cette technique s’appelle la chasse au « gros gibier » et elle est, selon nos estimations, la principale stratégie utilisée par nombre des groupes de rançongiciel les plus efficaces qui sévissent au CanadaNotes de bas de page 52.

Figure 11 : Incidents de cybersécurité affectant les infrastructures essentielles du Canada

Les secteurs d’activités des infrastructures essentielles du Canada ont été la cible de divers incidents de cybersécurité, dont des incidents liés à des rançongiciels et des intrusions de réseau, qui ont eu pour effet de perturber leurs fonctions opérationnelles essentielles.

Secteur de l’énergie

Juin 2023 : Suncor Energy a été la cible d’un incident de cybersécurité qui a affecté sa filiale Petro-Canada. L’incident a nui temporairement au traitement des transactions par cartes de crédit et de débit dans les stations-service à l’échelle du CanadaNotes de bas de page 81.

Secteur des soins de santé

Décembre 2022 : L’hôpital SickKids de Toronto a été la cible d’un incident lié à des rançongiciels perpétré par un affilié du groupe de rançongiciel LockBit. Les répercussions de l’incident ont été mineures et LockBit a émis des excuses publiques et offert de fournir le décrypteur à l’hôpitalNotes de bas de page 82.

Octobre 2023 : Daixin, un groupe de rançongiciel, est responsable d’un incident lié à des rançongiciels qui a touché 5 hôpitaux dans le sud de l’Ontario. L’incident visait le fournisseur de technologies de l’information des hôpitaux et a forcé ceux ci à arrêter temporairement leurs systèmes internes. Il a mené au vol de dossiers sensibles et entraîné des retards dans les soins prodigués aux patientes et patientsNotes de bas de page 83.

Février 2024 : LockBit aurait revendiqué un incident lié à des rançongiciels contre la chaîne de pharmacies canadienne London Drugs qui a forcé l’entreprise à fermer temporairement certains de ses magasins dans l’Ouest du CanadaNotes de bas de page 84.

Secteur gouvernemental

Juin 2023 : Le gouvernement de la Nouvelle-Écosse a été affecté par l’exploitation mondiale des vulnérabilités du système de transfert de fichiers MOVEit effectuée par le groupe CL0P. Selon les estimations, l’incident a mené à la fuite de renseignements personnels de 100 000 fonctionnaires qui sont ou qui ont été employées et employés par la provinceNotes de bas de page 85.

Septembre 2023 : Des cybercriminelles et cybercriminels se sont introduits dans les systèmes de Services globaux de relogement Brookfield (BGRS), entreprise qui aide le personnel militaire et du Service extérieur du Canada avec les réinstallations, et ont accédé sans autorisation aux renseignements de membres du personnel du gouvernement du CanadaNotes de bas de page 86.

Mars 2024 : Un incident lié à des rançongiciels a ciblé les systèmes de technologies de l’information de la ville de Hamilton qui gèrent diverses fonctions municipales, comme les lignes téléphoniques de la ville. Ses effets se sont fait ressentir pendant des semainesNotes de bas de page 87.

 
 

Augmentation du nombre d’incidents liés à des rançongiciels touchant le secteur des soins de santé

Le nombre d’incidents de rançongiciel ciblant le secteur des soins de santé augmente de façon régulière dans le mondeNotes de bas de page 88. Ces dernières années, le Canada et ses alliés ont tous vécu des attaques par rançongiciel très médiatisées contre le secteur des soins de santé. En mars 2024, Change Healthcare a versé une rançon de plusieurs millions de dollars pour que des données médicales sensibles soient restaurées à la suite d’une attaque par rançongiciel qui a perturbé le processus de facturation pour les ordonnances dans des pharmacies partout aux États-UnisNotes de bas de page 89. Peu de temps après, soit en juin 2024, un incident lié à des rançongiciels ciblant la société de pathologie Synnovis a entraîné des retards importants dans plusieurs hôpitaux de Londres, au Royaume-Uni, et a mené au vol de données sensibles que les opératrices et opérateurs de rançongiciel ont publiées en ligneNotes de bas de page 90.

Selon une estimation, le nombre d’incidents liés à des rançongiciels touchant le secteur des soins de santé a presque doublé depuis 2022Notes de bas de page 88. Cette situation est inquiétante, car de tels incidents nuisent directement à la capacité des entités du secteur des soins de santé à offrir des services essentiels aux patientes et patientsNotes de bas de page 91. Toutefois, nous estimons qu’au cours des deux prochaines années, les opératrices et opérateurs de rançongiciel continueront presque assurément à choisir leurs victimes en fonction des occasions qui se présentent à eux plutôt qu’à jeter leur dévolu sur des cibles précises. Toute augmentation observée d’incidents liés à des rançongiciels touchant le secteur des soins de santé reflétera presque certainement une hausse du nombre d’incidents liés à des rançongiciels en général ainsi qu’un recours continu à la chasse au « gros gibier » par les principaux groupes de rançongiciel.

Figure 12 : Augmentation, par secteur, du nombre d’incidents liés à des rançongiciels au Canada observés par le Centre pour la cybersécurité, de 2022 à 2023
Figure 12 - La description détaillée suit immédiatement
Description detaillée - Figure 12 : Augmentation, par secteur, du nombre d’incidents liés à des rançongiciels au Canada observés par le Centre pour la cybersécurité, de 2022 à 2023

Graphique à barres représentant, par secteur, l’augmentation du nombre d’incidents liés à des rançongiciels observés par le Centre pour la cybersécurité entre 2022 et 2023 :

  • Technologies de l’information : 159 %
  • Finances : 157 %
  • Construction : 133 %
  • Transports : 122 %
  • Services professionnels : 112 %
  • Vente au détail : 90 %
  • Soins de santé : 75 %
  • Énergie : 67 %

La catégorisation des secteurs s’inspire du Système de classification des industries de l’Amérique du Nord (SCIAN).

 
 

Les opératrices et opérateurs de rançongiciel peaufinent leurs tactiques pour maximiser les profits et éviter la détection

Les opératrices et opérateurs de rançongiciel améliorent sans cesse leurs stratégies et adaptent leurs techniques afin de maximiser leurs profits et d’éviter la détection par les forces policièresNotes de bas de page 92. Nous sommes d’avis que les motivations financières et la souplesse du modèle de RaaS ont presque assurément renforcé la résistance des opératrices et opérateurs de rançongiciel face aux mesures de perturbation prises par les organismes d’application de la loi.

L’écosystème de rançongiciel se fractionne sous l’effet de la pression des organismes d’application de la loi

Des opérations majeures menées récemment par les forces d’application de la loi partout dans le monde dans le but de fragiliser l’écosystème de rançongiciel ont presque certainement amoindri les capacités des groupes visés et semé le chaos dans les mouvements cybercriminels clandestinsNotes de bas de page 93. Cependant, nous sommes d’avis que ces perturbations n’auront presque certainement pas un effet à long terme sur l’environnement de rançongiciel parce que les opératrices et opérateurs trouvent habituellement des façons de s’ajuster, de se doter d’une nouvelle image et de reprendre leurs opérations, sauf si les membres des principaux groupes de RaaS sont arrêtésNotes de bas de page 94.

Dans le même ordre d’idée, il est presque certain que le modèle de CaaS a rendu l’écosystème de rançongiciel plus résistant aux mesures prises par les organismes d’application de la loi. Il est difficile d’enquêter sur la cybercriminalité étant donné la complexité du réseau dont font partie les services facilitateurs et les cybercriminelles et cybercriminels qui interagissent dans des espaces en ligne sans frontièresNotes de bas de page 95. Si une opération policière ébranle les opérations d’un fournisseur de CaaS populaire, la ou le responsable va souvent renouveler son image et relancer ses services ou bien un autre service va rapidement prendre sa place. En raison de la souplesse du modèle de CaaS , il est facile pour les cybercriminelles et cybercriminels de faire appel simultanément à plusieurs fournisseurs de services de sorte à pouvoir se tourner vers d’autres fournisseurs si l’un d’eux se fait prendreNotes de bas de page 94.

Opérations internationales de perturbation menées par les organismes d’application de la loi contre l’écosystème de rançongiciel

Les groupes suivants étaient des éléments importants de l’écosystème de rançongiciel. Avant les opérations de perturbation, ils étaient liés à plus de 1 000 compromissions partout dans le monde et avaient amassé des millions de dollars en rançonNotes de bas de page 96.

  • Janvier 2023 : Des organismes d’application de la loi ont infiltré les réseaux de Hive, fourni les décrypteurs aux victimes pour qu’elles puissent récupérer leurs données et saisi l’infrastructure de HiveNotes de bas de page 97.
  • Décembre 2023 : Des organismes d’application de la loi ont saisi l’infrastructure d’ALPHV (aussi connu sous le nom de BlackCat) et fourni un décrypteur aux victimesNotes de bas de page 98.
  • Février 2024 : Des organismes d’application de la loi ont saisi l’infrastructure de LockBit et ont gelé des comptes de cryptomonnaie liés à LockBit. Ils ont aussi arrêté certains des membres principaux du groupeNotes de bas de page 99.

Nous estimons avec quasi-certitude que le fractionnement de l’écosystème de rançongiciel s’intensifiera au cours des deux prochaines annéesNotes de bas de page 94. Les associées ou associés commenceront presque certainement à agir de façon autonome et à créer leurs propres variantes de rançongiciel pour réduire le risque d’être touchés par les opérations de perturbation des organismes d’application de la loiNotes de bas de page 100. Nous estimons que les plus petits groupes de rançongiciel commenceront probablement à collaborer pour accroître leurs capacités ou tenteront d’attirer dans leurs rangs des associées ou associés de groupes touchés par les opérations de perturbation afin de prendre la place de leurs anciens compétiteurs et s’emparer d’une plus grande part du marché des attaques par rançongiciel, ce qui vient embrouiller davantage le contexte de la menaceNotes de bas de page 101.

Intensification des méthodes d’extorsion

Les opératrices et opérateurs de rançongiciel intensifient leurs méthodes d’extorsion et exercent une plus grande pression sur les victimes pour qu’elles paient les rançons. Certains groupes de rançongiciel ont commencé à afficher sur leur site Web un compte à rebours jusqu’à la fuite prévue des données volées ou ils vont même jusqu’à appeler directement les victimes ou leurs clients et à les menacer de divulguer leur information personnelle s’ils ne paient pas la rançon demandéeNotes de bas de page 102. De plus, des opératrices et opérateurs de rançongiciel ont critiqué publiquement les organisations victimes de leur rançongiciel dans le but de nuire à leur réputation et ont encouragé des clients des victimes à poursuivre ces dernières en justiceNotes de bas de page 103. Des opératrices et opérateurs de rançongiciel ont même commencé à faire pression sur leurs victimes en évoquant de nouvelles lois qui obligent les victimes à signaler les incidents liés à des rançongiciels. Par exemple, des opératrices et opérateurs liés à ALPHV ont prétendu avoir déposé une plainte auprès de la Commission des valeurs mobilières des États-Unis (U.S. Securities and Exchange Commission) contre la victime parce que celle-ci a omis de signaler un incident lié à des rançongiciels dont ALPHV est lui même responsableNotes de bas de page 104. Nous estimons que les opératrices et opérateurs de rançongiciel continueront de modifier leurs méthodes d’extorsion au cours des deux prochaines années dans le but de maximiser la chance de recevoir des paiements des victimes.

 
 

Les opératrices et opérateurs de rançongiciel emploient de nouvelles tactiques pour cacher leurs activités

Des organismes d’application de la loi se sont intéressés de près à certains opérateurs et opératrices de rançongiciel, alors nombre d’entre eux ont commencé à appliquer simultanément plusieurs techniques d’obscurcissement pour se camoufler, éviter la détection et minimiser leur empreinte numériqueNotes de bas de page 91.

Figure 13 : Techniques d’obscurcissement utilisées par les opératrices et opérateurs de rançongiciel

Attaques par deux rançongiciels
Utiliser plusieurs souches de rançongiciel pour mener des attaques successives contre la même cible afin d’éviter que les attaques ne soient attribuées aux personnes responsablesNotes de bas de page 105.

Chiffrement

Chiffrement à distance
Utiliser un dispositif compromis pour chiffrer les données d’autres dispositifs sur le même réseau et ainsi contourner les mécanismes de sécuritéNotes de bas de page 106.


Chiffrement hybride
Utiliser plusieurs couches de chiffrement pour que les victimes aient plus de mal à récupérer leurs donnéesNotes de bas de page 107.

Attaques d’exploitation des ressources locales
S’introduire discrètement dans un réseau en se fondant dans les opérations réseau courantes pour se déplacer et élever les privilèges dans le but de chiffrer ou de voler des données sensiblesNotes de bas de page 108.

Langages de programmation rares
Coder les maliciels en se servant de langages de programmation rares afin de contourner les mécanismes de sécurité conçus pour détecter les langages de programmation plus courantsNotes de bas de page 109.

La collaboration est de mise pour contrer la menace changeante de rançongiciel

Nous sommes d’avis que les opératrices et opérateurs de rançongiciel continueront à diversifier leurs tactiques en réaction à l’attention grandissante que leur portent les organismes d’application de la loi. Pour contrer la menace à l’avenir, il sera primordial de comprendre la menace et le modèle d’activité de CaaS et de tenir compte de la nature changeante de l’écosystème. La collaboration entre l’industrie, les organismes d’application de la loi et tous les échelons de gouvernement ainsi que la sensibilisation de la population canadienne à la cybercriminalité seront de mise pour renforcer la résilience face à cette menace changeanteNotes de bas de page 110.

 
 

Contexte

Le CST utilise son expertise pour aider à surveiller et à détecter les menaces sur les réseaux et systèmes d’information du Canada, ainsi que pour mener des enquêtes connexes. Selon nos observations depuis l’ECMN 2023-2024, nous avons relevé cinq tendances qui influenceront le contexte des cybermenaces du Canada jusqu’en 2026 :

  • Tendance no 1: Les technologies d’intelligence artificielle (IA) amplifient les menaces dans le cyberespace
  • Tendance no 2: Le savoir-faire des auteures et auteurs de cybermenace évolue pour échapper à la détection
  • Tendance no 3: Les auteures et auteurs de cybermenace non étatiques inspirés par des intérêts géopolitiques sont source d’imprévisibilité
  • Tendance no 4: La concentration des fournisseurs augmente la vulnérabilité en matière de cybersécurité
  • Tendance no 5: Les services commerciaux à double usage se retrouvent sur le champ de bataille numérique

Les tendances notées dans les ECMN antérieures sont toujours pertinentes

Avant d’examiner les cinq tendances susmentionnées, il est important de noter que les tendances ayant une incidence sur le contexte des cybermenaces du Canada énumérées dans les ECMN précédentes demeurent d’actualité. Ces tendances continuent à évoluer au fil du temps en fonction des développements géopolitiques, technologiques et des auteures et auteurs de menace. Par exemple :

  • L’exposition aux cybermenaces continue d’augmenter : Outre l’adoption et le déploiement continus de l’Internet des objets (par exemple, les véhicules connectés), il est prévu que l’essor des services et des plateformes infonuagiques d’ IA stimule la demande pour les infrastructures de soutien, comme la production d’énergie et les centres de données capables d’appuyer l’ IA , et mène au transfert de volumes encore plus élevés de données aux environnements en nuage. Il est aussi très probable que les organisations spécialisées dans l’ IA (dont les laboratoires axés sur la recherche sur l’ IA et le développement de modèles d’ IA ) soient maintenant des cibles plus importantes pour les auteures et auteurs de cybermenaceNotes de bas de page 111.
  • Les attaques contre la chaîne d’approvisionnement se poursuivent : Les auteures et auteurs de cybermenace continuent de lancer des attaques contre la chaîne d’approvisionnement numérique en compromettant ou en exploitant un fournisseur de services infonuagiques, de technologies de l’information (TI) ou de logiciels pour permettre l’exploitation des clientes et clients qui utilisent le service. Ces attaques comprennent les doubles attaques contre la chaîne d’approvisionnement, où une attaque contre la chaîne d’approvisionnement en amène une autreNotes de bas de page 112.
  • Les vulnérabilités publiques continuent d’être exploitées : Les auteures et auteurs de cybermenace mènent constamment des analyses afin de trouver des vulnérabilités de sécurité publiques dans les logiciels et exploitent les vulnérabilités non corrigées afin d’accéder sans autorisation à des réseaux privés et publics. Le nombre de vulnérabilités et expositions courantes (CVE pour Common Vulnerabilities and Exposures) continue d’augmenter (voir la Figure 14). Les auteures et auteurs de menace exploitent ces vulnérabilités plus rapidement que jamais. Des attaques sont lancées à peine quelques jours après le dévoilement d’une vulnérabilitéNotes de bas de page 113.
Figure 14 : Nombre de vulnérabilités et expositions courantes (CVE) selon la gravitéNotes de bas de page 114
Figure 14 - La description détaillée suit immédiatement
Description detaillée - Figure 14 : Nombre de vulnérabilités et expositions courantes (CVE) selon la gravité

Graphique à barres affichant le nombre annuel de vulnérabilités et expositions courantes signalées selon la gravité.

Graphique à barres affichant le nombre annuel de vulnérabilités des années 2010 à 2023
Année Niveau de gravité faible Niveau de gravité moyen Niveau de gravité élevé Niveau de gravité critique
2010 304 2 493 2 208 42
2011 287 2 491 1 769 61
2012 537 3 016 1 821 66
2013 563 2 296 2 060 156
2014 590 5 255 2 250 310
2015 559 3 978 2 961 578
2016 270 3 559 4 060 1 380
2017 228 5 574 6 681 2 163
2018 157 6 229 7 113 2 235
2019 289 6 231 6 583 2 405
2020 410 7,800 7 846 2 774
2021 442 9 035 9 103 2 818
2022 467 9 733 9 662 3 918
2023 379 11 341 9 602 3 960
 
 

Tendance no 1 : Les technologies d’intelligence artificielle amplifient les menaces dans le cyberespace

Les technologies d’ IA réduisent presque certainement les obstacles à l’entrée et augmentent la qualité, l’ampleur et la précision des activités de cybermenace malveillantesNotes de bas de page 115. Les cybercriminelles et cybercriminels ainsi que les auteures et auteurs de cybermenace parrainés par un État utilisent des outils d’ IA générative et prédictive (notamment les grands modèles de langage [GML]) pour appuyer leurs processus de travail, de la génération de contenu à l’analyse de mégadonnées. Nous estimons que les auteures et auteurs de cybermenace compétents sur le plan technique tenteront presque certainement de trouver de nouvelles façons malveillantes d’employer les outils d’ IA au cours des deux prochaines années à mesure que les technologies évoluent. Ils pourraient, par exemple, automatiser certaines parties de la chaîne de cyberattaque dans le but d’accroître la productivitéNotes de bas de page 116.

Figure 15 : Incidents liés à l’ IA générative à l’échelle mondiale ayant été signalés publiquement et ayant causé un préjudice ou un quasi-préjudiceNotes de bas de page 117
Figure 15 - La description détaillée suit immédiatement
Description detaillée - Figure 15 : Incidents liés à l’ IA générative à l’échelle mondiale ayant été signalés publiquement et ayant causé un préjudice ou un quasi-préjudice

Graphique linéaire représentant l’augmentation du nombre d’incidents liés à l’ IA générative à l’échelle mondiale ayant été signalés publiquement et ayant causé un préjudice ou un quasi-préjudice, entre 2010 et 2024. La ligne pointillée indique le nombre total d’incidents anticipé pour 2024, lequel est fondé sur les données des six premiers mois de l’année.

Graphique linéaire représentant l’augmentation du nombre d’incidents entre 2010 à 2024
Année Nombre d’incidents
2010 0
2011 0
2012 0
2013 0
2014 0
2015 0
2016 2
2017 4
2018 2
2019 5
2020 11
2021 6
2022 36
2023 107
2024 138
 

L’ IA améliore la personnalisation et le pouvoir de persuasion des attaques par piratage psychologique

Les cybercriminelles et cybercriminels ainsi que les auteures et auteurs de cybermenace parrainés par un État ont presque certainement recours à des GML pour améliorer les attaques par piratage psychologique qui visent à manipuler les cibles afin de les amener à faire quelque chose qui porte atteinte à leurs intérêts, comme divulguer de l’information sensible, autoriser des transactions frauduleuses ou télécharger un malicielNotes de bas de page 118. Les outils d’ IA générative permettent aux auteures et auteurs de cybermenace de créer du contenu visuel et audio réaliste en usurpant l’identité de personnes de confiance (c'est-à-dire l’hypertrucage), ce qui renforce l’apparence de légitimité aux yeux des cibles et aide à les persuaderNotes de bas de page 119. Les auteures et auteurs de cybermenace ont également recours à l’ IA pour concevoir des courriels d’hameçonnage personnalisés à grande échelle qui sont à la fois convaincants et rédigés sans erreurs grammaticales et dans un style naturel. Les destinataires ont alors encore plus de mal à repérer et à filtrer les tentatives d’hameçonnageNotes de bas de page 120.

Les technologies d’ IA augmentent la qualité et l’ampleur des campagnes étrangères d’influence en ligne

Dans l’ECMN 2023-2024, nous avons discuté de la façon dont les auteures et auteurs de cybermenace peuvent créer et répandre la désinformation générée par IA . Depuis, un nombre croissant de pays, y compris la Chine, la Russie, l’Iran et Israël, auraient incorporé des articles, des images et des vidéos générés par IA trompeurs ou faux (hypertrucage) à leurs opérations d’influence en ligne (mésinformation, désinformation et malinformation) afin d’augmenter la qualité et l’ampleur de leurs campagnesNotes de bas de page 121. Ils utilisent également très probablement des outils d’ IA pour générer des personas fictifs en ligne et des comptes robots sur les médias sociaux dans le but d’amplifier l’engagementNotes de bas de page 122. Ces campagnes visent à affaiblir les adversaires en polluant l’espace d’information en ligne, en minant la confiance envers les institutions et en semant le doute et la division au sein de la société cibléeNotes de bas de page 123.

Nous estimons que la désinformation accentuée par l’ IA risque davantage de gagner du terrain lorsqu’elle présente au moins l’une des caractéristiques suivantesNotes de bas de page 124 :

  • intensifie des messages polarisants qui existent déjà dans la société ciblée;
  • comble un vide dans l’espace d’information;
  • est répandue par une ou des sources fiables ou officielles;
  • cible des situations temporaires où le temps pour réfuter le faux contenu est limité.

L’essor des sites Web générés par IA

Les États étrangers créent des sites Web de fausses nouvelles qui ont l’air de vrais organes de presse dans le cadre de leurs campagnes de désinformation. Bon nombre de ces sites sont conçus pour ressembler à des médias locaux qui ont cessé leurs activités et reposent sur du contenu généré par IANotes de bas de page 125.

L’IA prédictive améliore les capacités d’analyse des mégadonnées

Les États bien nantis tirent très probablement avantage des outils d’ IA pour les aider à traiter et à analyser les larges volumes de données qu’ils recueillent. Nous évaluons que les services de renseignement étranger utilisent très probablement l’analyse de données augmentée par IA pour trouver des schémas et des modèles dans les données en masse, obtenir des renseignements sur les personnes et les actifs d’intérêt, et informer les cyberopérations consécutivesNotes de bas de page 126.

 
 

Tendance no 2 : Le savoir-faire des auteures et auteurs de cybermenace évolue pour échapper à la détection

Puisque les mesures de défense des réseaux réussissent mieux à détecter les menaces pour la sécurité et à y intervenir, les auteures et auteurs de cybermenace ont développé leur savoir-faire dans le but de réduire au minimum la détection et de dissimuler plus longtemps leurs activités sur les systèmes des victimes.

Les auteures et auteurs de cybermenace ciblent et exploitent les appareils périphériques connectés pour accéder à des réseaux

Le temps d’occupation des attaquantes et attaquants diminue

16 days in 2022 and 10 days in 2023

Le temps d’occupation global moyen – nombre de jours pendant lesquels une attaquante ou un attaquant est présent sur un système compromis avant la détection – a continué de diminuer en 2023 comparativement à 2022.

MandiantNotes de bas de page 127

Les auteures et auteurs de cybermenace exploitent les vulnérabilités touchant les dispositifs de sécurité et de réseau situés en périphérie des réseaux – que l’on appelle les appareils « périphériques » connectés (comme les routeurs, les pare-feux et les solutions de réseau privé virtuel [RPV]). En compromettant un appareil périphérique connecté, une auteure ou un auteur de cybermenace peut s’introduire dans un réseau, surveiller, modifier et exfiltrer le trafic réseau circulant sur l’appareil ou possiblement pénétrer encore plus loin dans le réseau de la victime.

Les auteures et auteurs de cybermenace ciblent très probablement les appareils périphériques connectés parce que les mesures de défense réseau peuvent offrir des capacités limitées de surveillance et de détection des activités liées à des maliciels sur les réseaux, surtout comparativement à d’autres vecteurs d’accès tels que les courriels d’hameçonnageNotes de bas de page 128. À titre d’exemple, au début de 2024, le Canada et ses alliés ont détecté qu’une auteure ou un auteur de cybermenace parrainé par un État doté de fonds importants et de moyens sophistiqués avait recueilli et exfiltré des données après avoir exploité deux vulnérabilités nouvellement découvertes dans des appareils RPV utilisés par les réseaux du gouvernement et d’infrastructures essentielles nationalesNotes de bas de page 129.

Les auteures et auteurs de menace exploitent des ressources locales dans les environnements compromis pour échapper à la détection

Les auteures et auteurs de cybermenace ayant recours à des techniques d’exploitation des ressources locales (LOTL pour Living-of-the-Land) utilisent, à d’autres fins, les processus et les outils natifs des systèmes qui sont déjà présents dans l’environnement afin de se déplacer discrètement dans le réseauNotes de bas de page 130. Les mesures de défense réseau parviennent difficilement à détecter les intrusions puisqu’il n’y a pas de déploiement de maliciel ou d’outil personnalisé sur le réseau compromisNotes de bas de page 131. Des auteures et auteurs de cybermenace parrainés par la Chine, la Russie et l’Iran ont recours à des techniques LOTLNotes de bas de page 8. Par exemple, une auteure ou un auteur de cybermenace russe aurait compromis le réseau d’un service public d’électricité ukrainien en octobre 2022 et utilisé des techniques LOTL pour se déplacer dans l’environnement de technologies opérationnelles du service public avant de provoquer une panne d’électricitéNotes de bas de page 132.

Les auteures et auteurs de cybermenace abusent d’infrastructures à domicile pour cacher leurs activités malveillantes

Des auteures et auteurs de cybermenace parrainés par un État ainsi que des cybercriminelles et cybercriminels mènent presque assurément des activités malveillantes contre le Canada en se servant des ressources virtuelles et des infrastructures de mise en réseau (comme les routeurs) situées en Amérique du Nord pour limiter la surveillance et la visibilité de leurs opérationsNotes de bas de page 133. À titre d’exemple, afin de se fondre dans les activités réseau normales, des auteures ou auteurs de cybermenace parrainés par la Russie et la Chine ont été observés en train d’acheminer leurs cyberopérations malveillantes au moyen d’équipement réseau compromis de petites entreprises et de bureaux à domicile (SOHO pour Small Office and Home Office) situé au Canada et aux États-Unis, notamment des routeurs appartenant à des ménages et à des entreprises qui ne se doutaient de rienNotes de bas de page 134.

 
 

Tendance no 3 : Les auteures et auteurs de cybermenace non étatiques inspirés par des intérêts géopolitiques sont source d’imprévisibilité

Les conflits et les tensions géopolitiques inspirent des activités de cybermenace perturbatrices chez les groupes non étatiques que l’on appelle communément les hacktivistes. Les hacktivistes motivés par des intérêts géopolitiques mènent généralement des attaques dans le but d’attirer l’attention, dont des attaques par DDoS , la défiguration de sites Web et des fuites de données. Certains groupes ont augmenté l’impact de leurs activités en ciblant, de façon opportuniste, et en perturbant les infrastructures essentielles vulnérables, comme les réseaux d’adduction et de distribution d’eau, ce qui risque d’entraîner de graves préjudices pour le publicNotes de bas de page 135.

L’hacktivisme géopolitique est en forte hausse en période de conflits militaires. Les groupes hacktivistes ont orchestré des campagnes en lien avec l’invasion de l’Ukraine par la Russie en 2022 et la guerre entre Israël et le Hamas en 2023Notes de bas de page 136. Les tensions diplomatiques motivent également les activités d’hacktivisme. Après que le Canada a accusé l’Inde d’être impliquée dans l’assassinat d’un citoyen canadien, un groupe hacktiviste pro-Inde a déclaré avoir défiguré des sites Web au Canada et avoir lancé de brèves attaques par DDoS contre de tels sites Web, y compris le site Web public des Forces armées canadiennesNotes de bas de page 137.

Cet écosystème non étatique est dynamique et imprévisible. Certaines et certains hacktivistes sont réellement motivés par un mélange de patriotisme, d’idéologie ou par une cause politique, mais d’autres sont opportunistes et profitent des conflits à des fins personnelles ou de notoriété. De nouveaux groupes font leur entrée de jeu régulièrement, alors que d’autres groupes bien établis se dissolvent et réapparaissent sous un nouveau nom. Les cibles et les motivations des joueuses et joueurs changent couramment. Des groupes s’unissent pour collaborer et coordonner leurs efforts, même si les intérêts géopolitiques pour lesquels ils militent sont différentsNotes de bas de page 138. Bien que les activités d’hacktivisme puissent parfois être alignées sur les intérêts d’un État adversaire, la relation entre un hacktiviste et l’État, le cas échéant, peut être difficile à discerner.

Tendance no 4 : La concentration des fournisseurs augmente la vulnérabilité en matière de cybersécurité

La prestation de nombreux services technologiques est concentrée, puisqu’un service numérique donné est offert par quelques grands fournisseurs seulement qui comptent chacun une vaste base d’utilisatrices et utilisateursNotes de bas de page 139. Des organisations des secteurs public et privé, dont des banques, des compagnies aériennes et des prestataires de soins de santé, dépendent de ces fournisseurs de service dominants, comme un fournisseur de services infonuagiques ou une plateforme logiciel-service spécialisée, pour soutenir des fonctions et des opérations critiquesNotes de bas de page 140. Un cyberincident touchant un seul fournisseur de services dominant peut avoir un impact sur l’ensemble d’un secteur.

Les fournisseurs de services dominants sont des cibles de prédilection pour les auteures et auteurs de cybermenace qui cherchent à voler les données de la clientèle ou à obtenir des rançonsNotes de bas de page 141. À titre d’exemple, Amazon, Microsoft et Google, les trois fournisseurs de services infonuagiques commerciaux les plus importants qui représentent environ 65 % du marché infonuagique mondial, font face sans relâche aux assauts des auteures et auteurs de cybermenace étatiques qui développent des capacités pour les compromettreNotes de bas de page 142. Ces auteures et auteurs se renseignent sur les réseaux internes des plateformes infonuagiques et améliorent leurs techniques pour contourner les mécanismes de sécurité et exfiltrer des données sans se faire découvrir.

La compromission des fournisseurs de services dominants amplifie l’impact des incidents de cybersécurité. Les activités de cybermenace contre des services qui représentent de véritables goulots d’étranglement numériques – points de défaillance uniques dans les chaînes d’approvisionnement – peuvent avoir un effet de domino déstabilisant et généralisé sur l’économie et la société, voire mettre en péril notre sécurité nationale (voir la figure 16)Notes de bas de page 143.

Figure 16 : Cyberattaques récentes contre des fournisseurs dominants et leur part du marchéNotes de bas de page 144

Part du marché : 30 %
Microsoft

Logiciel de productivité
d’entreprise

 


  • Cyberespionnage parrainé par la Chine contre Microsoft Exchange Online (mai 2023)
  • Au cours de l’intrusion, les auteures ou auteurs de cybermenace auraient pu avoir accédé à n’importe quel compte Exchange Online.
  • Les auteures ou auteurs de menace ont compromis les boîtes aux lettres Exchange Online officielles de hauts fonctionnaires du gouvernement américain.
Part du marché : 44 %
Change Healthcare

Demandes de remboursement de frais médicaux et plateforme de traitement des paiements


  • Attaque par rançongiciel contre Change Healthcare (février 2024)
  • L’attaque a interrompu les paiements versés aux fournisseurs de soins de santé et aux pharmacies pendant plusieurs semaines et a forcé certaines patientes et certains patients à payer eux-mêmes leurs médicaments essentiels.
Part du marché : 50 %
CDK Global

Plateforme de logiciel-service pour concessionnaires d’automobiles


  • Attaque par rançongiciel contre CDK Global (juin 2024)
  • L’attaque a provoqué une panne du système de gestion des concessionnaires de CDK pour des milliers de concessionnaires d’automobiles aux États-Unis et au Canada pendant une durée maximale de deux semaines, ce qui a perturbé les opérations de vente, de financement, de service, d’inventaire et d’arrière-guichet.
 

Même si les fournisseurs de services dominants savent qu’ils sont des cibles très prisées, l’envergure et la complexité de leurs opérations peuvent limiter leur capacité de découvrir et de corriger les vulnérabilités en matière de cybersécuritéNotes de bas de page 145. Par exemple, en mai 2023, une auteure ou un auteur de menace que l’on considère affilié à la Chine a compromis le service de messagerie Exchange de Microsoft qui est basé sur le nuage et, selon le comité d’examen de la cybersécurité (Cyber Safety Review Board) des États-Unis qui enquêtait sur l’incident, cette intrusion aurait pu être évitéeNotes de bas de page 146. Moins d’un an plus tard, en novembre 2023, une auteure ou un auteur de cybermenace parrainé par la Russie a compromis à son tour le service Exchange du géant de l’informatique et a exfiltré des données de comptes de courriel d’entreprise de Microsoft, y compris des données de clientes et clients. Puis, en juillet 2024, le service d’informatique en nuage Azure de Microsoft n’a pas résisté à une attaque par DDoS qui a causé une interruption de certains services Microsoft partout dans le monde pendant des heuresNotes de bas de page 147. D’après Microsoft, une erreur dans ses mécanismes de défense a contribué à la panneNotes de bas de page 148.

 
 

Tendance no 5 : Les services commerciaux à double usage se retrouvent sur le champ de bataille numérique

Des gouvernements partout dans le monde se tournent vers des services commerciaux pour s’assurer un avantage concurrentiel sur leurs adversaires et assurer leur résilience durant un conflit. Les solutions commerciales, telles que les capacités informatiques avancées et les systèmes commerciaux de télécommunications par satellite, permettent aux forces armées et aux organismes de renseignement d’avoir accès à des technologies novatrices à grande échelle pouvant être déployées rapidementNotes de bas de page 149.

Nous estimons que les services commerciaux fournis à des clientèles civiles et militaires (appelés services à double usage) sont presque certainement ciblés par des auteures et auteurs de cybermenace parrainés par un ÉtatNotes de bas de page 150. Nos adversaires se sont montrés désireux et capables de faire appel à des cyberattaques pour interrompre, réduire ou refuser l’accès de leurs concurrents à des services commerciaux lors d’un conflit arméNotes de bas de page 151. Ces attaques peuvent avoir un effet domino perturbateur sur les clientes et clients civils ainsi que les clientes et clients d’infrastructures essentielles qui utilisent ces mêmes services.

Par exemple, des auteures et auteurs de cybermenace parrainés par un État visent très probablement les systèmes satellites commerciaux à double usage qui appuient les communications militaires ou gouvernementales, les outils de télédétection et les capacités de navigation. Depuis le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie en février 2022, des auteures et auteurs de cybermenace parrainés par la Russie mènent des opérations de guerre informatique et électronique (comme le brouillage et l’usurpation) contre les services de télécommunications par satellite commerciaux utilisés par les forces armées ukrainiennesNotes de bas de page 152. Au moins l’une de ces attaques a causé une interruption des services Internet par satellite pour des clientes et clients civils à l’extérieur de la zone de conflit.

Figure 17 : Exemple de service de télécommunications par satellite à double usage
Figure 17 - La description détaillée suit immédiatement
Description detaillée - Figure 17 : Exemple de service de télécommunications par satellite à double usage

Graphique représentant un exemple de service de télécommunications par satellite à double usage. Le service de télécommunications par satellite fournit des services Internet à un navire civil et des services de télécommunications à un navire militaire.

 
 
 

Les auteures et auteurs de cybermenace représentent une menace persistante pour la prospérité économique et la sécurité nationale du Canada. En tant que pays prospère, le Canada demeure une cible intéressante pour les cybercriminelles et cybercriminels motivés par l’appât du gain qui sont appuyés par un écosystème de cybercriminalité hautement adaptable et résilient. Parallèlement, la menace que font peser les activités de cybermenace parrainées par des États sur le Canada sera influencée par les événements géopolitiques au-delà de nos frontières, l’état des relations étrangères du Canada et un contexte international défini par la rivalité sur le plan économique et technologiqueNotes de bas de page 153. Les menaces dans le cyberespace seront de plus en plus influencées par un système mondial où un large éventail d’auteures et auteurs de cybermenace forment des réseaux de force et de convenance variées à la poursuite de leurs intérêts individuelsNotes de bas de page 154.

En dépit des vulnérabilités en matière de cybersécurité du Canada et de l’environnement de cybermenace qui évolue sans cesse, il est possible d’atténuer l’intensité des cybermenaces et leur incidence sur le Canada grâce à la sensibilisation et à l’adoption de pratiques exemplaires en matière de cybersécurité par la population et les organisations.

Le CST met à profit tous les aspects de son mandat, ainsi que ses partenariats, pour défendre les réseaux fédéraux et les systèmes d’importance pour le gouvernement du Canada. Il continuera à communiquer de l’information importante sur le contexte des cybermenaces à la population canadienne, au secteur privé et aux infrastructures essentielles. Les Canadiennes et Canadiens peuvent avoir l’assurance que le Centre pour la cybersécurité est déterminé à surveiller les cybermenaces pesant sur le Canada, à faire avancer la cybersécurité et à protéger les systèmes sur lesquels ils comptent au quotidien, en soutenant les réseaux des infrastructures essentielles ainsi que d’autres systèmes qui sont importants pour le Canada. Nous continuerons de travailler avec le secteur privé pour favoriser la sécurité et la résilience, et pour nouer des partenariats internationaux en vue d’atteindre nos objectifs communs en matière de cybersécurité.

Nous invitons les lectrices et lecteurs à consulter nos conseils sur la cybersécurité pour obtenir de plus amples renseignements sur les cybermenaces exposées dans la présente évaluation et sur les façons de se protéger contre ces cybermenaces. Les organisations peuvent également consulter notre Boîte à outils des objectifs intersectoriels relatifs à l’état de préparation en matière de cybersécurité pour en apprendre davantage sur les approches permettant d’améliorer leur posture de cybersécurité.

 
 
 
 
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